Tribune Libre : « Le recul de l’âge légal de la retraite à 64 ans est une mesure injuste qu’il faut retirer du projet de réforme »

« Notre groupe d’élus départementaux agit à son niveau pour le mieux-être de la population du Maine-et-Loire. De par ses compétences sociales et de solidarité, en plus du secteur de l’enfance, le Conseil départemental verse notamment des prestations et mène des actions pour l’insertion, le handicap et les personnes âgées. Le niveau et la qualité de l’emploi, les possibilités de départ en retraite influent sur la quantité d’allocataires et de bénéficiaires de ces politiques sociales que nous gérons.

En ce sens, nous pensons qu’il est de notre responsabilité de nous exprimer sur la réforme des retraites, compte-tenu des conséquences qu’elle génère.
Nous sommes opposés au recul de l’âge légal de 62 à 64 ans. La mesure d’âge prévue par le projet de réforme pénalisera principalement les carrières longues et donc celles et ceux qui ont commencé à travailler très jeunes. Ceux-ci sont souvent dans les métiers manuels et les plus difficiles physiquement. Actuellement, le taux d’activité diminue considérablement avec l’âge et la priorité devrait être de favoriser l’emploi de ces personnes avant l’âge actuel de la retraite. En Maine-et-Loire, en 2022, les demandeurs d’emploi de plus de 50 ans de catégorie A représentaient 27% du total des demandeurs d’emploi (8 660 sur 32 140 personnes). Il devient quasi-impossible de retrouver un emploi à partir d’un âge plus avancé.

Le financement du système des retraites ne nécessite absolument pas une mesure de report d’âge légal qui, en plus d’être injuste, va pénaliser les travailleurs les plus modestes. Ce sont les salariés qui ont commencé à travailler tôt et/ou qui ont souvent des carrières modestes qui vont payer le prix de cette réforme en travaillant plus longtemps que les autres alors qu’une partie d’entre eux est exclue du marché du travail actuellement. Les maladies professionnelles plus nombreuses chez les séniors. Nous sommes pour valoriser le travail qui est un lieu de rencontres, de vie sociale et, quand il est exercé dans de bonnes conditions, un facteur d’épanouissement. La « valeur » travail est un ciment de notre société. Cependant, la réalité d’exercice de beaucoup de métiers amène une usure prématurée avec l’âge qui touche particulièrement des secteurs professionnels très représentés en Maine-et-Loire. Par exemple, les risques de TMS (troubles musculo- squelettiques) touchent particulièrement une partie de l’industrie, le textile, l’agroalimentaire, le secteur agricole et la plasturgie pour ne citer qu’eux. Les taux de prévalence de ces maladies augmentent avec l’âge et réduisent les possibilités de retrouver un emploi adapté. Ce sont entre autres ces salariés que l’on retrouve plus tard comme bénéficiaires de l’accompagnement social.

Il ne faut pas créer des inégalités supplémentaires pour les femmes. Actuellement les pensions de retraites sont inférieures de 40% pour les femmes, hors pensions de réversion. Les carrières entrecoupées, notamment du fait de la maternité, les inégalités salariales, la plus faible proportion de femmes dans l’encadrement des entreprises expliquent ce chiffre. La question concerne donc prioritairement le travail mais le système de retraite doit aussi être construit de façon à réduire ces inégalités, avec des dispositifs solidaires en faveur des mères. Comme il a été rapporté ces derniers jours, les femmes seront encore plus défavorisées que les hommes par le projet en cours. »