Avec AFP
La « bombe sociale de demain » prédite par l’ex-ministre du Logement Olivier Klein a déjà explosé, estiment les professionnels du secteur, agences immobilières, promoteurs et bailleurs compris. Selon la Fondation Abbé Pierre, qui milite depuis plusieurs décennies contre la précarité et le mal-logement, 330.000 personnes étaient sans domicile en France en 2022, deux fois plus qu’en 2012. Parmi elles, 30% ont pourtant un travail, souligne Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim). « Cette crise est sans précédent parce que cette fois-ci, tous les signaux sont au rouge : étudiants, salariés, locataires, toutes les catégories de population sont concernées, même les propriétaires« , affirme Eddie Jacquemart, président de la Confédération nationale du logement (CNL), première organisation représentative des locataires.
« Pire niveau »
Principal déclencheur: la remontée en flèche des taux directeurs des banques centrales en 2022 pour lutter contre l’inflation. Effet boule de neige, elle a fait grimper les taux immobiliers et poussé les banques à fermer le robinet du crédit. Ces hausses rapprochées ont accru des problèmes déjà existants. Parmi eux, le déclin continu de la production de logements sociaux depuis 2018, sous le triple effet de la baisse des subventions, de la hausse des coûts de construction et des ponctions de l’Etat sur les bailleurs. Selon l’Union sociale pour l’habitat (USH), représentant les bailleurs sociaux, les autorisations de logements sociaux devraient passer s’établir à 82.000 en 2023, le « pire niveau depuis 2005 », alors qu’il en faudrait « 198.000 par an ». Quant aux demandes, elles atteignent le chiffre record de 2,6 millions. Côté acheteurs, ce n’est pas mieux. « La situation n’était pas formidable avant, mais les Français avaient au moins accès au crédit à des taux très avantageux« , observe Thomas Lefebvre, directeur scientifique de SeLoger. Or depuis janvier 2022, leur capacité d’emprunt a chuté de 25% quand les prix des biens restent à des niveaux très élevés, selon la Fnaim, qui pointe une dégringolade de 22% des ventes dans l’immobilier ancien en 2023, la « plus forte baisse annuelle depuis plus de 50 ans« . Faute de pouvoir acheter, les ménages restent en location, grippant encore davantage la machine. En cinq ans, le nombre de logement disponibles à la location a fondu de 59%, rappelle la Fnaim, tandis que les loyers augmentent bien plus vite que les revenus. La construction, déjà en petite forme, a elle plongé de 23,7% en 2023 par rapport à 2022. Face ce marasme, l’absence de mesures régulatrices de l’Etat et celle d’un ministre dédié au logement alimentent les critiques.
Les promesses du premier ministre Attal
Le « gouvernement n’est pas du tout en phase avec ce qui est en train de se passer », dénonce Eddie Jacquemart. « A la différence des crises passées », l’Etat n’a pas pris de « mesure générale de soutien à l’accession à la propriété ou à l’investissement locatif particulier », analyse aussi le centre de réflexion Terra Nova dans un rapport publié lundi. Véronique Bédague, PDG de Nexity, déplore elle qu’« il y a(it) dans la sphère publique, l’idée qu’en réalité nous n’avons pas besoin de logements, compte-tenu des projections démographiques, du nombre de logements vacants et des résidences secondaires », dans le quotidien Le Monde. En 2023, le gouvernement a « globalement poursuivi une politique marquée du sceau de la rigueur budgétaire », regrette Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre. En revanche, aucune proposition « pour réguler le marché (encadrement des loyers, du foncier et des meublés touristiques) n’a été retenue« , dit-il. Le nouveau Premier ministre Gabriel Attal a promis mardi « un choc d’offre » pour « déverrouiller » le secteur du logement « avec comme objectif d’y créer 30.000 nouveaux logements d’ici trois ans« . La semaine dernière, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a affirmé vouloir « construire vite, à coup de simplifications des règles, de dérogations, de soutien au secteur du bâtiment ». « Ca marchera, ce sera plus efficace », a-t-il assuré.
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Commentaires 1
Attention: les « enfants à la rue » sont principalement des enfants de familles de migrants en situation irrégulière: c’est un aspect très particulier de la « crise du logement »