Comme à la mairie de Saumur la semaine dernière (relire notre article), Jackie Goulet, le président de l’agglomération Saumur Val de Loire, a présenté aux élus communautaires les orientations budgétaires. Un exercice qui permet de tracer les grandes lignes directrices pour l’année à venir en matière de budget et de grands projets. Malgré un contexte économique, politique et international complexe et qui freine pour le moins les projections – « Entre la croissance limitée, le contexte géopolitique délicat, la situation gouvernementale instable et les annonces qui ne sont pas encore connues pour le budget national 2025, les prévisions sont de l’ordre de Madame Irma », a estimé le président – Jackie Goulet se réjouit malgré tout d’une situation financière saine qui permettra « d’absorber et d’adapter le budget aux annonces du gouvernement », qui pourraient sabrer une partie du budget des collectivités.
Des recettes croissantes et une dette maitrisée
Dans le détail, cette situation saine se traduit par des recettes fiscales en augmentations sur ces dernières années, passées de 30.8 millions d’euros en 2022 à 33 millions d’euros en 2024 et estimées à 34 millions d’euros en 2025. Les raisons principales : la mise en place de la taxe GEMAPI pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention aux inondations qui a rapporté 1.3 million d’euros, l’augmentation du prix de l’eau, le lissage des tarifs des déchets ou encore la taxe mobilité, payée par les entreprises de plus de 11 salariés, qui a augmenté en raison d’un taux de chômage plus bas et une revalorisation des salaires (celle-ci est calculée sur la masse salariale). La dette de la collectivité se veut elle aussi « parfaitement soutenable », selon Jackie Goulet. Elle est de 30 millions d’euros au 1er janvier 2025 (tout budget confondu). « Le niveau d’endettement de la collectivité (ndlr : ratio entre la dette et l’épargne) est aujourd’hui de 2.5 ans. C’est donc bien en dessous du seul de vigilance placé à 7 ans, au seuil d’alerte à 10 ans et du seuil indépassable de 15 ans pour les collectivités. L’encours de la dette (ndlr : calculée uniquement sur le budget principal à savoir 16.5 millions d’euros) s’élève à 165 euros par habitant. Cela est largement plus bas que la moyenne nationale des collectivités de même strate qui se situe à 369 euros », poursuit-il.
23 millions d’euros d’investissements en 2025
Pour l’agglomération, cela permet d’envisager 2025 avec un budget global de 120 millions d’euros (tout budget confondu : principal, eau potable, eaux pluviales, assainissement, déchets, transport) dont 85 millions d’euros pour le fonctionnement et 35 millions d’euros pour les investissements. Sur le seul budget principal, cela représente pour 2025, 44 millions d’euros de fonctionnement et 23 millions d’investissements. « En matière d’investissements, nous nous sommes fixé trois priorités, à savoir le développement économique (11 millions d’euros en 2025 contre 9 millions en 2024), les services publics (7 millions d’euros en 2025 contre 7.5 millions en 2024), et l’environnement (avec une enveloppe de 4.5 millions pour 2025 contre 3 millions l’an passé). » Cette politique d’investissement passera donc par des projets comme la réhabilitation des friches industrielles, la construction de nouvelles usines et ateliers-relais, un travail avec d’autres partenaires sur le développement de la filière hydrogène, la poursuite du travail d’études autour du data center en souterrain, la finalisation en 2025 de la cour artisanale (relire notre article), le développement du tertiaire avec des projets place Marc Leclerc, à l’étage de la maison des sports de combat ou encore sur la rue des Moutons (l’objectif est d’avoir 2 000m2 disponibles pour le tertiaire sur le territoire en 2025). Le Tourisme ne sera pas en reste avec la poursuite du projet de la Loire à Vélo troglo, l’objectif d’atteindre une participation de 11 000 cyclistes à Anjou Vélo Vintage, le développement de nouvelles boucles équestres et itinéraires cyclables, la mise en tourisme de la Dive. A noter également la poursuite des actions autour de la restauration collective et la mise en place d’une cuisine centrale, une réflexion sur la récupération des eaux des stations d’épuration pour l’agriculture et le lancement du projet de revitalisation de l’hippodrome de Verrie avec 2.5 millions d’euros de travaux injectés en 2025.
Un soutien intéressé pour un nouvel EPR à Chinon
Parmi les autres sujets qui ont été évoqués et qui seront abordés durant l’année à venir, l’agglomération souhaite poursuivre son travail de réflexion avec le territoire du Chinonais et Edf autour de la construction d’un EPR nouvelle génération. En mai 2023, l’agglomération avait en effet voté une motion pour soutenir la candidature du territoire voisin pour accueillir l’un de ces nouveaux réacteurs nucléaires (relire ici). « L’expérience de Flamanville a laissé un goût amer, notamment parce que le territoire n’avait pas suffisamment prévu le coup en matière de logement… », estime Jackie Goulet qui compte bien anticiper le dossier. « Pour développer cet EPR le territoire a besoin d’environ 1 000 logements et de plusieurs hectares pour des activités économiques annexes ainsi que de la formation sur le territoire. C’est pourquoi nous avons sanctuarisé 4 à 5 hectares dans la zone industrielle d’Allonnes. Pour les logements, nous avons réservé avec Alter un espace pour 250 logements sur la zone Vaulanglais-Noirettes. Je prends le risque de bloquer ces espaces jusqu’à fin 2026 où la décision doit tomber (ndlr : pour les logements sur Vaulanglais-Noirettes, le risque est somme toute limité puisque seulement une dizaine de terrains ont été vendus en plus de 2 ans jusqu’à maintenant sur un projet qui prévoit à terme 550 logements – relire notre article). Enfin, pour ce qui est de la formation, nous allons travailler avec des établissements comme Carnot-Bertin ou l’école de production T’ CAP T’ PRO pour la soudure, pour créer de nouvelles filières nécessaires à la construction de cet équipement. Cela représente 10 000 emplois pendant 10 ans sur le territoire et plus de 3 000 emplois in fine. C’est donc une plus-value pour le territoire », argumente convaincu le président. Une convention de partenariat sera contractualisée entre le Saumurois et le Chinonais : « On ne demande pas un soutien sans engagements d’autre part. Cette convention permettra donc de nous assurer de retombées sur le territoire. »
Un projet trop coûteux pour l’ancienne piscine d’Offard ?
Si le projet n’a pas été détaillé lors de ce conseil, une présentation étant prévue lors du prochain conseil communautaire, le président Goulet a malgré tout indiqué que des études et travaux seraient lancés en 2025 sur l’ancienne piscine d’été d’Offard à Saumur. Un projet très attendu par la population pour cette piscine à l’état d’abandon depuis de longues années. « Le coût de ce projet s’élèvera, TTC, à près de 11 millions d’euros. Ce sera un projet volontariste et innovant proposant une autre façon de se baigner qui n’existe pas sur le territoire », précise Jackie Goulet. Pour Bernard Henry ce projet « bien que mythique pour les habitants », a tendance à « m’affoler quand je vois le montant de cet investissement qui représente près de la moitié du montant des investissements prévus pour 2025 et au vu du futur qu’on nous annonce ». Pour Bertrand Chandouineau, qui estime une fois encore que le président de l’agglo est aussi optimiste que le maire de Saumur quant à son budget, alors même que la situation économique et politique est « inconnue ». « Il ne faudrait pas décider durant ce mandat des investissements qui pourraient être problématiques pour le prochain mandat en 2026. » Guy Bertin, vice-président, a lui aussi fait part de son scepticisme quant à ce projet de « 11 millions d’euros pour 3 mois dans l’année » et a fait part de ces craintes quant aux décisions gouvernementales pour le budget à venir et l’impact sur les collectivités et notamment les départements, dont il est également conseiller. Un appel à la prudence également relayé par un autre vice-président, Eric Mousserion. Toutefois, pour Jackie Goulet, il revient à l’agglo de « continuer à investir pour le territoire puisque nous en avons les moyens. Si nous, nous ne le faisons pas avec des recettes en augmentation et une dette dont beaucoup de collectivités rêveraient, qui le fera ? Il faut en revanche que chacun des sujets soit orchestré de manière à ce que le coût de fonctionnement des investissements soit contrôlé. Ainsi, le projet de la piscine d’Offard ne représentera un budget de fonctionnement global que de 150 000 euros par an. Je suis élu depuis 30 ans et tous les deux ans on nous dit que cela va être dur. Oui, peut-être serons-nous amenés à participer un peu plus aux efforts budgétaires, mais nous avons suffisamment de réserve pour passer sereinement 2025. Il ne faut pas rajouter de sinistrose à la sinistrose. C’est sûrement mon côté optimiste qui parle. »
Des débats visiblement trop longs
Au final, les débats autour du budget auront duré près de deux heures. Un des rares dossiers à l’ordre du jour à apporter des discussions étant donné que les autres s’avéraient beaucoup plus administratifs. Toutefois, cela semble avoir été encore trop long pour certains, comme la conseillère de Doué-en-Anjou Myriam De Carcaradec qui a lancé à la fin de la délibération : « C’est beaucoup trop long ces présentations et ces conseils ! Nous ne sommes plus disponibles pour encore digérer toutes ces informations. J’ai enchainé les réunions toute la journée ! » Laissant l’audience dans un certain désarroi. Et le président, un brin « agacé » de répondre sèchement : « Excusez-moi de prendre le temps pour quelque chose que j’estime d’important, à savoir un budget de 120 millions d’euros qui définira les actions de la collectivité. Personne ne nous a forcés à être élus ! » Et l’élue douessine de relancer qu’elle n’avait pas signé pour autant de réunionite.
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