Pour rappel, la Fédération des entreprises de boulangerie (FEB) – qui regroupe notamment « de nombreuses chaînes de boulangerie-pâtisserie » – avait demandé en 2017 aux services de l’Etat d’abroger cet arrêté qui avait été pris en 2001 après accord entre des organisations patronales et des syndicats de salariés.
Le préfet de Maine-et-Loire avait alors engagé le 9 juillet 2018 une nouvelle « consultation » des adhérents des organisations professionnelles intéressées, afin de s’assurer de « la persistance d’une volonté majoritaire de la profession pour le maintien de son arrêté de fermeture hebdomadaire ». Or, « plus de 60 % des répondants » et « une majorité relative de l’ensemble des établissements » y restaient favorables. Les abstentionnistes avaient alors été considérés, par défaut, favorables au statu quo.
Désavouée en première instance en 2019 puis en appel en 2021, la Fédération des entreprises de boulangerie avait obtenu in extremis gain de cause en juillet 2022 devant le Conseil d’Etat. « Compte tenu du nombre des établissements qui n’avaient pas répondu à cette enquête, (…) il appartenait à la cour de rechercher s’il leur avait été indiqué (…) qu’une opinion par défaut leur serait imputée en l’absence de réponse », avait justifié la plus haute juridiction administrative française.
Les abstentionnistes avaient été déclarés favorables au statu quo
« La fermeture (…) ne peut être légalement ordonnée sur la base d’un accord syndical que dans la mesure où cet accord correspond (…) à la volonté de la majorité indiscutable de tous ceux qui exercent cette profession à titre principal ou accessoire dans la zone géographique », reprend donc cette fois-ci la cour administrative d’appel de Nantes.
« L’existence de cette majorité est vérifiée lorsque les entreprises adhérentes (…) aux organisations d’employeurs (…) s’y sont déclarées expressément favorables (…) ou que la consultation de l’ensemble des entreprises (…) a montré que l’accord accueillait l’assentiment d’un nombre d’entreprises correspondant à la majorité des établissements », ajoute-t-elle.
Or, dans cette affaire, les résultats de la « consultation » préfectorale auprès de 1.037 établissements – liste ramenée à 905 établissements après actualisation – ont fait apparaître que « si près de 61 % des répondants (…) s’étaient exprimés en faveur du maintien de la fermeture, ils ne représentaient que 35 % de la totalité des établissements », soulignent les juges.
De même « le courrier (…) adressé à chaque établissement (…) non affilié à une organisation professionnelle n’indiquait pas que l’absence de réponse (…) vaudrait acceptation de la décision qui serait prise », rappellent-ils dans cet arrêt en date du 10 février 2023. « Les abstentions de ces établissements ne peuvent être regardées comme des suffrages favorables à un jour hebdomadaire de fermeture », en déduit la cour administrative d’appel de Nantes.
« De plus en plus veulent ouvrir sept jours sur sept »
Cet arrêt « implique nécessairement » que l’arrêté préfectoral contesté soit « abrogé », en concluent donc les juges. « Il y a lieu d’abroger cet arrêté dans un délai de deux mois », précisent-ils. L’Etat devra au passage verser 1.500 € à la Fédération des entreprises de boulangerie (FEB) pour ses frais de justice.
« La défaillance du préfet dans le décompte fait ressortir une absence de majorité indiscutable », avait confirmé à l’audience l’avocate de la FEB. Me Margaux Zeisser (cabinet ACTE DIXHUIT), avait aussi rappelé que la situation du Maine-et-Loire n’était pas isolée : « une vingtaine » d’arrêtés préfectoraux du même type ont déjà été annulés en justice.
« De plus en plus d’entreprises veulent ouvrir sept jours sur sept, compte tenu du contexte sanitaire », avait encore déclaré l’avocate de cette fédération professionnelle qui a été jugée « représentative » par l’Etat « en fin d’année dernière ».
Jusqu’à cet arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes, les boulangeries de Maine-et-Loire étaient obligées de fermer au moins un jour par semaine ; les chaînes et les supermarchés devaient faire de même avec leur seul rayon Pain. « C’est pour cela que de plus en plus mettent des machines en libre-service« , avait expliqué l’avocate de la fédération requérante.
Les autres parties prenantes à l’instance étaient la Fédération professionnelle de la boulangerie et boulangerie-pâtisserie du Maine-et-Loire, le Groupement indépendant des terminaux de cuisson (GITE), la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution, ITM Ouest (Intermarché), les hypermarchés Leclerc d’Angers, Cholet, Saumur et Segré et enfin les sections départementales de la Confédération générale de l’alimentation en détail, de la CGT, de la CFDT, de la CFE-CGC et de la CFTC.
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