Louis Jean Joseph Bouët voit le jour le 6 avril 1880 à Montfaucon-sur-Moine, une petite commune des Mauges située à une vingtaine de kilomètres de Cholet. La famille est de condition modeste, le père est sabotier. Tout jeune, on propose au garçon de devenir curé ou instituteur. Il opte pour l’enseignement.
Il réussit le concours d’entrée à l’Ecole normale d’Angers en 1897. Mais à l’issue des études, c’est le désenchantement. Il est d’abord nommé à Trélazé, puis à Saumur. Il découvre des classes surchargées. Son premier poste à l’école des Récollets est pour lui une déception : 50 élèves dans la classe préparatoire !
Louis reste deux ans à Saumur. Il doit interrompre sa carrière pour effectuer son service militaire. Revenu à la vie civile, il épouse Gabrielle Dechézelles qui sera sa collaboratrice indéfectible durant toute sa vie.
Louis décide très tôt de lutter pour l’amélioration des conditions de vie des instituteurs. Avec des collègues, en 1904, il fonde une section angevine de l’Emancipation de l’instituteur. L’initiative nationale de création de syndicats d’instituteurs est saluée par de nombreuses personnalités comme Anatole France. Deux ans plus tard, Louis Bouët adhère à la S.F.I.O. (ex Parti socialiste). Le ministre de l’Instruction publique, Aristide Briand, fustige le rapprochement entre le monde ouvrier et le monde enseignant.
En 1910, est lancée une nouvelle revue L’Ecole émancipée, laquelle existe toujours. Louis et Gabrielle vont y participer durant 15 ans.
Le ministre de l’Instruction publique exige que les sections syndicales d’instituteurs se dissolvent d’elles-mêmes. Des procès sont intentés contre elles. A Angers, les syndicalistes prennent comme avocat un homme qui fera parler de lui plus tard et avec lequel Louis sera en opposition : Pierre Laval.
Le 28 juillet 1914, la guerre contre l’Allemagne est déclarée. Louis Bouët est réformé dès le début du conflit, mais il est fiché dans le carnet B, c’est-à-dire soupçonné d’activité d’espionnage ! En août 1916, il rencontre Léon Trotski à Paris.
Le premier combat au sortir de la guerre pour Louis et ses amis sera l’amnistie générale pour les instituteurs « défaitistes » qui ont été sanctionnés pendant le conflit.
De 1920 à 1925, la famille Bouët habite au 15, rue Fardeau à Saumur. En représailles de ses activités syndicales, à l’issue de 5 mois à l’école de la rue Cendrière, Gabrielle Dechézelles est mutée dans une école à classe unique très chargée à Linières-Bouton à trente kilomètres de Saumur.
Sur le plan national, les autorités ne désarment pas la lutte entamée contre les enseignants engagés. Gabrielle et Louis sont révoqués à quelques jours d’intervalle en 1920.
Le 30 décembre 1920, au congrès de Tours, est créé le Parti communiste français. Louis Bouët intervient durant les débats. L’année suivante, il veut présenter une conférence sur la Commune de Paris à Saumur, mais on lui refuse la salle de la Justice de Paix.
En 1921, Gabrielle et Louis prennent la direction de L’Ecole émancipée. Cette même année, Louis est élu au comité directeur du Parti communiste. On lui propose le poste de secrétaire général de L’Humanité, mais il refuse.
Gabrielle et Louis sont réintégrés en 1924. Ils sont nommés à Lézigné où ils sont très mal reçus par le curé du village et les notables. L’inspection les mute alors d’office à Méron, près de Doué-la-Fontaine. Une fois par semaine, par tous les temps, ils se rendent à Saumur à vélo pour rédiger L’Ecole émancipée rue du Temple. Louis quitte le Parti communiste en 1927, Gabrielle en est exclue deux ans plus tard.
En 1933, ils demandent à bénéficier de la retraite. L’Administration s’empresse, cette fois, de leur donner satisfaction. Quatre ans plus tard, ils ont la douleur de perdre leur fils qui meurt de la tuberculose à 32 ans.
Les Bouët s’installent à la Cité des Moulins, au 3, avenue Victor Hugo. Ils sont locataires des premières maisons construites par l’office H.L.M. de Saumur.
Considéré comme « individu dangereux pour la défense nationale », le 13 juin 1940, Louis Bouët est arrêté et placé en résidence surveillée par Georges Mandel au château de Sablou, à Fanlac en Dordogne.
Il rentre chez lui après 8 mois d’internement, très affaibli. Durant l’occupation, il se fait oublier et se consacre au jardinage. En février 1944, il perd son ami le poète Marcel Martinet qui était venu s’installer à Saumur six ans plus tôt.
En 1962, le couple perd une de leurs deux filles, Elsie. Louis ne s’en remettra pas.
Il meurt le 9 juillet 1969 à l’âge de 89 ans. Il est inhumé au cimetière de Saumur, mais la concession n’ayant pas été renouvelée, sa tombe n’existe plus. Gabrielle meurt le 15 janvier 1977 à Biarritz.
Le couple a beaucoup écrit. Outre les articles de presse et les livres, l’Institut Français d’Histoire Sociale (I.F.H.S.), géré par la Bibliothèque historique des Archives n ationales, conserve à Fontainebleau le fonds Bouët qui se compose d’une soixantaine de dossiers.
Bibliographie :
– MAITRON Jean, Dictionnaire biographique, mouvement ouvrier, mouvement social (DBMOMS), Editions de l’Atelier, Paris 2016
– BLANDIN Gino, Louis et Gabrielle Bouët, trente ans de combat syndicaliste et pacifique, in bulletin de la Société des Lettres Sciences et Arts du Saumurois, n° 169, Saumur, 2020
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