Jusqu’en 1990, il écrasait les prix. Mastodonte de la grande distribution, Mammouth s’est pourtant éteint, remplacé par l’oiseau emblématique de l’enseigne Auchan. Un volatile léger aux gazouillis annonciateurs d’un avenir chantant. Mais las, son ramage s’est affadi et ne bercera plus d’illusions fécondes 2 389 salariés poussés prématurément vers la sortie. Si ce groupe connaît de réelles difficultés, ce n’est absolument pas le cas de Michelin dont l’année 2023 s’est soldée par des bénéfices records (3,6 milliards d’euros). Mais, le n° 1 mondial « anticipe », fidèle à sa devise originelle « Nunc est bibendum » traduisez du latin « c’est maintenant qu’il faut boire », en référence au confort apporté par un pneu qui « boit » les obstacles parsemés sur les mauvaises routes. L’universel bibendum de Clermont-Ferrand ne s’embarrasse donc pas des entraves susceptibles de réduire sa vitesse de croisière. Il ferme ses usines du Grand Ouest, à Vannes et Cholet, laissant sur la chaussée 1254 employés. Les syndicats sont vent debout, la grève menace et Michel Barnier promet de demander des comptes à ces grands bénéficiaires du fameux CICE (Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi). On connaît la réponse. Les millions d’euros attribués par la réduction de leurs charges sociales ont bien servi à favoriser la recherche, l’innovation et la transition écologique ! C’est juré. Bibendum n’a pas dérapé, il va poursuivre son chemin et piétiner fougueusement les écueils, les ralentisseurs dommageables à sa progression.
Où sont les femmes ?
Cette semaine, des manœuvres de terrassement visant à déblayer le terrain pour éclaircir des desseins encombrés se sont encore distinguées. Dans la monarchie absolue du Qatar, par exemple, où un référendum organisé en famille a validé, à 90,60%, l’abolition des élections législatives. Pourquoi donc s’encombrer d’opposants officiels, mauvaises graines que l’on va donc priver de soleil pour éviter la repousse. Curieusement, au sein de démocraties commotionnées dans le maquis de l’actualité, des actes et des promesses corroborent cette propension habituellement réservée aux souverains incontrôlés. C’est le cas en Israël avec la sanction subite prononcée par Benyamin Nétanyahou à l’encontre de Yoav Gallant, ministre de la défense favorable à la suppression des mesures d’exemption appliquées à 66 000 étudiants d’écoles talmudiques. Pour eux pas de guerre contre l’appui inconditionnel des partis ultra orthodoxes de la coalition gouvernementale. La rue est vent debout pour résister à cette adversité. Nétanyahou avance. Et que dire du frais émoulu président des Etats-Unis. Donald Trump va tout casser, les opposants, les médias, les guerres, les traités, les marchés et les pieds de tous ceux tentés par l’insoumission politique et économique à la bannière étoilée. L’Europe est vent debout contre cette infortune. Trump avance. A mille lieues de là, sous la chape de plomb du régime mafieux et tyrannique des mollahs, une jeune étudiante brave l’interdit. Elle dépose son voile et, cheveux au vent, pieds nus, en sous-vêtements, déambule timidement devant l’université Azad de Téhéran. Dans l’indifférence coupable de la foule, elle attend sereinement la sanction inéluctable. Vent debout contre la fatalité, elle avance. Elle avance vers le néant d’un hôpital psychiatrique, en grand danger d’être battue, violée par les tortionnaires des forces de sécurité. « Levons-nous femmes esclaves, et brisons nos entraves. Debout, debout, debout ! ». De la Bastille à Téhéran, le chant des femmes ne fait guère écho.
Georges Chabrier
Copyright © IGNIS Communication Tous droits réservés