Pour échapper au réel d’un quotidien morose, il faut parfois se surpasser. Un peu comme le bourdon qui défierait l’ordre naturel des mathématiques rendant improbable le vol d’un insecte à la voilure dérisoire et à la panse rebondie. Dans l’ignorance de son incapacité, il ose, butine et pollinise inlassablement pour redonner goût à la vie. Il suffirait donc d’afficher un optimisme volontaire pour travestir la triste réalité de nos afflictions galopantes. Ce métissage de la méthode Coué nous rapproche du soleil, du beau temps annoncé après la pluie. Mais, oui, il pleut tout le temps, les nappes phréatiques se repaissent d’eaux exubérantes, les rivières gonflent jusqu’à détoner dans un flux tourmenté, sinistre, emportant çà et là des albums de vies détruites. Quelques voitures distraites s’aventurent même dans les bains bouillonnants d’un dernier voyage, mal assuré, non remboursé. Tout part à vau-l’eau, malgré les efforts parfois consentis pour iriser nos vies d’un arc-en-ciel à paillettes, à facettes engageantes et curatives. Mais, peut-être n’ose-t-on pas, à l’instar du bourdon, s’offrir la liberté de croire en des vertus enfouies sous le voile léger de l’audace. Ce mercredi, par exemple, Saumur était ville morte, alors que s’étirait dans ses rues un long serpentin de cyclistes de très haut niveau. Une occurrence rare ayant justifié un déploiement impressionnant de moyens techniques efficacement assumés par les services de la Ville, mais boudée par les administrés. Habitants et commerçants avaient en effet tourné le dos, découragés par une communication surabondante d’interdictions de tous poils incitant à la désertion. Dommage, l’intérêt manifeste, partagé ou pas, de cette initiative aurait dû bénéficier d’une campagne alléchante pour aiguiser l’appétit et l’adhésion des citoyens.
Un peu, beaucoup, passionnément…
Tout part à vau-l’eau quand, aussi, notre ministre des Armées, Sébastien Lecornu, se hasarde dans un hypothétique câlin avec son homologue russe. L’impénétrable Choïgou n’aime pas les caresses et l’a éconduit sans noblesse dans son entremise de rapprochement pour le combat commun de lutte contre le terrorisme. Pire encore, ne lui a-t-il pas reproché la complicité de notre Etat dans l’odieux attentat perpétré à Moscou. Difficile en ce cas de partager l’optimisme du plus serein des bourdons, sauf à chercher dans un champ parsemé de belles pensées quelques rares marguerites à effleurer pour dire qu’on aime, un peu, beaucoup jusqu’à passionnément, que les PFAS (polluants éternels) présents dans nos poêles soient bientôt bannis, que les moins de 27 ans puissent, dès cet été, bénéficier du nouveau « Pass rail » leur permettant de voyager sur l’ensemble des réseaux TER et Intercités, pour un montant forfaitaire mensuel de 49 €. Et, plus encore, cette excellente nouvelle concernant l’antibiorésistance, en passe d’être vaincue. La découverte d’une nouvelle molécule (testée sur l’homme) devrait incessamment permettre de lutter efficacement contre le risque sanitaire lié à une bactérie responsable d’infections nosocomiales. Le Zosurabalpin arrive, tel un interlude orchestral dans nos bourdonnements confus.
Georges Chabrier
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