Qui a eu cette idée folle, un jour, d’inventer l’école ? Ce sont les Sumériens de Mésopotamie, avec l’arrivée de l’écriture, il y a fort longtemps (- 3500 ans avant JC), et non Charlemagne, vilipendé par France Gall dans son fameux tube des années 60. L’empereur à la barbe fleurie n’avait quant à lui qu’une ambition personnelle de créer dans son palais d’Aix-la-Chapelle une académie rigoriste pour instruire de hauts fonctionnaires et l’élite de son aristocratie. Rien à voir avec l’aspiration des aïeux syriens ou de notre Jules Ferry fondateur de l’école laïque, gratuite et obligatoire (1881), celle que nous connaissons aujourd’hui. Sur le fond rien ne semble avoir changé, ce qui ne peut se décliner sur la forme, cabossée par les vicissitudes jalonnant le parcours contemporain de cette institution fondamentale. L’école va mal et notre pays dégringole dans les classements assurant la notoriété des nations reconnues pour la qualité de cette maîtrise constitutive. La France n’a plus la cote et son école s’enlise dans une fange qui souille le quotidien des enseignants et des apprenants, dans l’apathie caractéristique d’un ministère sclérosé, désarçonné par l’ampleur de la tâche. L’éducation nationale n’est pas l’éducation personnelle, ni un espace de socialisation prééminant sur l’apprentissage. A regret, elle s’apparente à un service public aux ambitions minimalistes camouflées derrières des apparences égalitaires trompeuses. Seules des évolutions majeures sur la qualité et l’homogénéité de l’offre inverseront la tendance baissière de ce constat. Mais, semble-t-il, le chemin emprunté dans les épisodes derniers de nos actualités laisse augurer du pire. Sous couvert de violence, dont on ne peut ignorer ni minimiser l’existence, le meilleur remède préconisé par les autorités reste… l’autorité. En témoigne l’affligeant spectacle de Gabriel Attal et du ministre de l’Intérieur, Eric Dupont-Moretti, devant un parterre désintéressé et imperméable de lycéens niçois invités à une leçon particulière sur les bienfaits de l’internat pour jeunes à la dérive. En fait leur internat, celui dans lequel ils retrouveraient leurs pairs, pour dériver ensemble sur le Radeau de la Méduse.
Les poly-exclus de l’éducation
S’il manque de place sur l’embarcation d’infortune, rassurons-nous, ils bénéficieront d’une garderie préventive jusqu’à 18h, en attendant, pour certains, l’application d’un couvre-feu, comme instauré par des précurseurs sur Cagnes-sur-Mer ou Béziers. Et, pendant ce temps-là, nos professeurs, nos instituteurs alimenteront leur grogne pour revendiquer l’essentiel de ce qui pourrait améliorer leur sort et donc celui des élèves, des moyens, de la formation, de la gratitude et du respect. Non encore la distillation de quelques augmentations généreuses, assez courantes, en ces temps tourmentés, pour étouffer les revendications. Voire des heures supplémentaires majorées pour assurer le patronage des naufragés des ZEP, des poly-exclus de l’éducation. Il est difficile d’imaginer l’impact et les bienfaits de ces différentes contraintes dans des temps et des lieux coupés d’un monde extérieur pourtant essentiel à l’épanouissement social des publics concernés. D’autant plus qu’un « verrou numérique » est concomitamment envisagé pour rompre le cordon ombilical avec les réseaux sociaux nocifs, mais si chers à nos adolescents. Plus d’Instagram, de Tik Tok ou Snapchat pour suivre les imprécateurs du Net ou, à moindre risque, le clientélisme exacerbé de politiciens en manque de pertinence et de raison. Jean-Luc Mélenchon empile les mauvais buzz par ses outrances oiseuses et confondantes. Sa référence à Eichmann dans l’affaire discutable de Lille a provoqué une énième consternation dans la sphère médiatique et un véritable atterrement endogène, un de plus, dans la maison NUPES. Le projet d’internat caressé par le Premier ministre pour amadouer les jeunes à la dérive ne cible pas les chevronnés. Dommage, certains candidats pourraient être aisément élus dès le premier tour.
Georges Chabrier
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