Le Kezako d’Hugo : Le rugby, jeu de main, jeu de gentlemen

Où que l’on regarde sur la planète, les jeux de ballon remontent à la nuit des temps. En Chine ancienne, dans le monde antique occidental ou dans les cultures précolombiennes, nous avons des reliquats d’activités en équipes, centrées autour d’une “balle”, où il est nécessaire de marquer des points (l’Harpastum romain ou le Cuju chinois, par exemple). N’en déplaise aux Bretons d’Astérix, il est peu probable que les habitants des îles britanniques aient pu droper quelconque balle du temps des menhirs, mais rendons aux Anglais ce qui leur revient : la paternité du rugby. Drôle de nom pour un sport, il ne faut pas en chercher l’origine bien loin puisque c’est celui d’une ville du centre de l’Angleterre. Il s’agirait initialement d’un dérivé du “soccer”, né au cours d’une partie dans un lycée où un étudiant aurait délibérément saisi le ballon dans ses bras pour aller marquer un but. William Webb Ellis est ainsi entré dans la légende en inspirant les bases de ce nouveau sport (du moins, c’est ce que le folklore a retenu) dont les premières règles sont déposées officiellement en 1845. Rapidement, cette variante s’est développée dans tout l’Empire britannique et chez ses voisins les plus proches tels que la France. Jusqu’à la création d’un événement international en 1886. Le premier match officiel, lui, s’est tenu en 1871 ; il a opposé l’Angleterre à l’Ecosse et s’est achevé sur un nul (1-1). À l’époque, aucun système de points n’existe encore, et puisque les deux équipes ont chacune réalisé un essai, elles n’ont pu être départagées. Plutôt étonnant, n’est-ce pas ?

Évolutions et schismes

On connaît bien évidemment le rugby à XV, mais il peut aussi être joué à XIII ou à VII. La variation du nombre de participants vient en majeure partie de désaccords entre clubs concernant les compensations à régler aux joueurs qui, à cause des matchs et des entraînements, manquaient des jours de travail. En 1895, un schisme a lieu dans la Rugby Football Union ; ainsi le rugby à XIII voit le jour dans le Yorkshire en même temps que sa nouvelle fédération, la Rugby Football League. Pour le rugby à VII, c’est un peu différent. Cette variante a été inventée en Ecosse pour accentuer le côté spectaculaire de ce sport et proposer ainsi davantage de matchs bien plus courts, donc plus explosifs et impactants. Le principe, peu importe le nombre de joueurs, reste invariable. Mais depuis sa création au début du XIXe siècle, ses règles ont beaucoup évolué, notamment au niveau du comptage des points. Initialement en 1886, un essai valait trois points, soit autant qu’un coup de pied (drop ou pénalité) et une transformation seulement deux points. Une petite vingtaine d’années plus tard, pour dynamiser le jeu au sol, la valeur de l’essai a été augmentée, passant de trois à cinq points. De même, les blessures n’étaient pas rares dans les rassemblements (ou ruck), et dès 1906 l’International Rugby Board a interdit les plaquages dits “dangereux” au-dessus des épaules, pour réduire les traumatismes crâniens et cervicaux. Plus récemment, on peut retenir la généralisation de l’arbitrage vidéo pour trancher sur les actions les plus litigieuses à partir de 2001 ; ou encore l’utilisation des cartons jaunes et rouges, pénalisant les fautes selon leur gravité, allant de l’exclusion temporaire d’un joueur (10 minutes) à l’exclusion définitive.

Mondial et diversité

Nous l’avons vu, le rugby s’est avant tout développé dans les pays du Commonwealth, sorte de tradition de la Couronne importée et assimilée par les locaux. La diffusion de ce sport en France s’est faite en priorité grâce aux étudiants britanniques. L’ancrage tout particulier du rugby dans le pays Basque, et plus globalement dans le Sud-Ouest, peut s’expliquer par la présence très affirmée des Anglais dans la région (n’oublions pas que l’Aquitaine fut anglaise pour un long moment !). L’influence de la diaspora n’est pas la seule raison à la diffusion de ce sport de force. Les compétitions internationales telles que le Tri-Nation ou le Tournoi des Six Nations ont largement poussé l’engouement populaire. La professionnalisation de ce sport en 1995 a également suscité de nombreuses vocations, ainsi que sa présence dans les épreuves des Jeux Olympiques au début du XXe siècle.
C’est pour cela que ce Mondial nous fait découvrir de jeunes nations pratiquantes telles que l’Uruguay, la Roumanie ou la Namibie. Une compétition mondiale qui, pour le coup, est elle-même très jeune par rapport à l’existence du rugby puisque sa création date de 1987. Si certaines équipes sont automatiquement qualifiées de par leur histoire et leurs performances, le pays hôte est systématiquement sélectionné également. Pour les autres, il faut participer à des phases de sélection et de repêchage. Pour le moment, seules 20 équipes se confrontent lors du Mondial, contre 32 pour le football.
En somme, les compétitions et les règles que nous connaissons du rugby sont relativement récentes comparées à l’âge – relatif – dudit sport. Pour ce qui est de la troisième mi-temps, quelque chose me dit que c’est inné à chaque compétition…

Hugo