Sur un espace d’environ 200m2 à l’extrémité du Grand Dortoir – qui abrite l’exposition « A Toute Volée » (relire nos articles) autour des cloches de Fontevraud – cette nouvelle proposition culturelle et historique mélange divers univers et explore la question du temps à travers la culture, la pop-culture, la science ou encore l’histoire. « Elle s’inscrit dans la continuité des actions et des projets menés à l’Abbaye depuis quelques années. Le temps a finalement toujours été présent dans notre démarche. Lorsqu’est né le projet recréation des cloches, il y avait déjà cette notion. Ce sont des outils qui servaient à rythmer la vie monacale et villageoise. Cela fait aussi écho à l’histoire carcérale du site. Le temps y est également une donnée très importante », souligne Nicolas Dupont conservateur à l’Abbaye et commissaire de l’exposition. Pour les équipes, créer une exposition sur un tel sujet n’était pas chose facile, « car c’est un sujet monstrueux, complet et très complexe ».
Une exposition aux multiples facettes et facétieuse
L’exposition se situe dans un espace clos, aux murs noirs, à l’éclairage tamisé. Sur les mûrs de nombreuses citations, tantôt sérieuses, tantôt drôles. Lorsque l’on rentre dans la première pièce, des grands physiciens comme Newton, Einstein ou Stephen Hawking font face à des œuvres de la pop culture : La Machine à explorer le temps, Doctor Who et Retour vers le Futur. « Nous avons beaucoup utilisé l’ironie et l’humour. Cela permet de rester proche du visiteur en évoquant des références communes qui peuvent prêter au sourire. Cela montre aussi cette ambivalence entre un sujet très sérieux vu par les physiciens, et qui est probablement l’expérience la plus universelle qui soit, pour qui celui-ci est immuable et pour qui le voyage dans le temps est impossible et la science-fiction qui, nous montre constamment le contraire », poursuit le commissaire.
Vient ensuite un vaste volet autour de l’histoire du temps, l’évolution de sa maîtrise par l’humanité avec divers calendriers, remontant parfois à quelques milliers d’années, des sabliers, explorant également la généalogie qui permet de remonter le temps au sein de sa propre filiation. Une horloge atomique y côtoie des cadrans solaires. L’exposition évoque également l’évolution des calendriers et le lien intime de ceux-ci au contrôle politique et social du monde. Et ce, jusqu’à l’époque moderne où les heures et les agendas s’organisent pour mieux s’articuler face à l’ouverture sur les autres. « Le rapport au temps n’a pas toujours été le même. Au moyen-âge, il n’y avait un rapport que très succin, le jour, la nuit, les cloches qui sonnaient parfois comme ici à Fontevraud. On observe également qu’au fil des époques, il y a eu différentes réformes qui venaient ajuster les calendriers en fonction des connaissances qui se développaient sur le temps et sa mesure qui montraient un certain décalage. Et ce jusqu’à aujourd’hui où l’heure est partout, y compris sur des objets dont cela n’est pas la fonction première : téléphones, micro-ondes… Mais force est de constater que ce n’est pas parce que l’on connaît mieux le temps et qu’on le mesure avec plus de précision, qu’on le maîtrise mieux pour autant. Nous sommes toujours à courir après, si ce n’est davantage encore qu’autrefois », développe Nicolas Dupont.
Une fin du temps
En fin d’exposition, on découvre des salles plus insolites. L’une avec un mur de différentes horloges plus contemporaines et des calendriers, allant du coucou de la Forêt Noire à l’horloge assiette de nos grands-parents en passant par d’autres objets de plus ou moins bon goût comme un torchon calendrier au motif de petits chats. La dernière pièce est une sorte d’appartement témoin où de très nombreux objets viennent « évoquer la mort. C’est un sujet évidemment inhérent au temps avec cette ambiguïté d’une conception à la fois cyclique du temps avec les heures, les mois, les jours, les mouvements des planètes, et une conception linéaire du début à la fin qui rappelle bien sûr l’inévitable destin de l’Homme. C’est par ailleurs un sujet que nous souhaitions vivement traiter puisqu’il est aujourd’hui malgré tout assez effacé de nos vies. Les cimetières sont rejetés à l’extérieur des villes, les pompes funèbres ne passent plus dans les villes… Toutefois, nous ne voulions pas aborder cette thématique particulièrement grave par un prisme sérieux, mais avec un certain décalage. C’est pourquoi on retrouve dans cette pièce des objets, des musiques, qui évoquent le temps qui passe et indubitablement la mort elle-même. Le tout de façon très contemporaine avec des accessoires du quotidien qui nous parlent », conclut-il.
Infos pratiques : Exposition du 7 octobre 2023 au 22 septembre 2025 à l’Abbaye de Fontevraud. Retrouvez l’ensemble des détails sur celle-ci et les différents événements liés (conférences et entretiens littéraires) sur https://www.fontevraud.fr/saison-culturelle/un-automne-a-fontevraud/.
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