Ils, elles sont passé(e)s par Saumur. Chronique de Gino Blandin : Jacques-Eugène Bury « Un républicain de vieille roche »

Cette rubrique bimensuelle, orchestrée par Gino Blandin, auteur saumurois et ancien président de la Société des Lettres de Saumur, se propose de brosser le portrait des personnalités qui, au fil du temps, sont venues à Saumur au cours de leur existence. Aujourd’hui, Jacques-Eugène Bury, un républicain de vieille roche (1814 - 1897).
Docteur Jacques-Eugène Bury (1814-1897), Président de la Société de Viticulture et directeur du Jardin des plantes de la Ville de Saumur (Archives municipales de Saumur).

Jacques-Eugène Bury naît à Saumur le 7 août 1814. Il est le dernier d’une fratrie de six. Son père, Jacques, est médecin militaire et sa mère, Marie Rathouis, femme au foyer. Elle est la fille d’un riche négociant saumurois franc-maçon. Monsieur Bury père exerce sa profession à Saumur, ce qui lui permet de rester maire de Distré pendant trente-deux ans. Les époux Bury résident à Saumur jusqu’en 1820, puis ils vont s’installer définitivement aux Clérins à Pocé.

Ils décident d’offrir des études secondaires à deux de leurs fils, Hippolyte et Jacques-Eugène. Ce dernier étudie d’abord au collège des garçons de Saumur, puis, en 1831, à la pension Hourmann à Angers, comme tous les enfants de l’aristocratie angevine. Hippolyte meurt du choléra à la fin de l’année 1832.

Jacques-Eugène est reçu bachelier es-lettres à Angers en 1833. L’année suivante, il se présente au concours de l’Hôtel-Dieu d’Angers dans l’espoir de décrocher une place d’interne à l’école secondaire de médecine. Admis, il est envoyé à l’hôpital militaire Saint-Nicolas. La même année, il est nommé chirurgien aide-major de la Garde nationale. En 1837, il quitte l’Anjou pour Paris où il devient bachelier es-sciences puis docteur en médecine à la faculté de Paris après sa thèse consacrée à la gynécologie.

Son diplôme en poche, il choisit de revenir à Saumur où il installe son cabinet au 16, rue du Paradis (aujourd’hui rue Dacier). En 1845, il épouse la fille d’un notaire de Brigné, Octavie Nourry, mais celle-ci meurt l’année suivante. Il se remarie aussitôt, suivant les vœux de la défunte, avec son amie Caroline Brung.

Jacques-Eugène va rester médecin à Saumur pendant 35 ans. Il est le praticien de l’hospice de la Providence. Très tôt, il est le « médecin à la mode » ce qui ne l’empêche pas d’être aussi celui des pauvres.

Quand éclate la Révolution de 1848, il est franc-maçon et membre du comité électoral de Coulon, comme Combier, Lecoy et Bodin. Entre 1851 et 1861, il vit discrètement exerçant sa profession presque gratuitement pour ne pas être inquiété par l’Administration. Les choses s’arrangent pour lui quand il décroche le très demandé poste de chirurgien-chef de l’Hôtel-Dieu de Saumur.

En 1860, Jacques-Eugène est élu conseiller municipal de Saumur. Après la démission de Charles Louvet, suite à son échec aux élections législatives, il devient maire par intérim avec Lecoy et ce jusqu’en septembre 1870. Pendant la guerre contre les Prussiens, Bury devient un véritable héros : il accueille dans sa maison de Pocé 52 varioleux ! Avec ses amis, il seconde le sous-préfet de Saumur dans l’organisation de la Défense.

Au mois de janvier 1874, il est à nouveau maire de Saumur par intérim, mais trois ans plus tard, il ne brigue pas le poste aux élections, le laissant à James Combier. Il préfère devenir maire de sa petite commune de Distré. Entre temps, il est nommé directeur du jardin des plantes et de l’école de viticulture de Saumur, juste au mauvais moment : le phylloxéra ravage le vignoble français. Il est alors élu président du comice agricole de l’arrondissement de Saumur, poste qui est réputé pour être un bon tremplin pour la députation !

En 1881, il est élu député et siège au sein du groupe de l’Union républicaine où il retrouve Allain-Targé. Maintenant, il est beaucoup sollicité : « depuis cette époque, je ne note plus le nom des personnes auxquelles j’écris mais c’est toujours au moins 20 ou 25 par jour » note-t-il dans ses carnets. Toutes sortes de demandes parviennent aux Clérins à Pocé. A la chambre, il se fait très discret, n’intervenant jamais. A Saumur, il est administrateur du collège de garçons et il s’occupe activement avec sa femme du collège de jeunes filles récemment ouvert par James Combier. Il défend le principe de laïcité. Monseigneur Freppel le maudit. Durant la période anticléricale d’opposition ouverte, le docteur Bury procède à Distré à l’expulsion des religieuses de l’école.

Jacques-Eugène Bury n’a jamais trouvé la notoriété qu’il recherchait à Paris, mais ses retours triomphants à Saumur sont la preuve qu’il y a toujours gardé un grand prestige. Les élections d’octobre 1885 se soldent par un échec retentissant pour les Républicains. Ils n’ont plus un seul élu. C’est le temps de la retraite pour le docteur.

En 1893, il reçoit la croix de chevalier de la Légion d’honneur. Le préfet de Maine-et-Loire le sollicite pour qu’il se présente aux élections sénatoriales, mais il est trop vieux, il refuse.

Jacques-Eugène Bury s’éteint le 12 avril 1897 à Distré, à l’âge de 82 ans. Une rue de Saumur porte son nom et une autre à Distré.

Bibliographie : EMERIAU Isabelle, Le docteur Bury : essai biographique (1814-1897), in Annales de Bretagne et des Pays de Loire, 1994.

 

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