Dans le cadre de sa programmation de création contemporaine, l’Abbaye royale de Fontevraud s’est engagée dans un projet sur six ans, pour six cloches. Chaque année une cloche est coulée chaque année et son décor est confié́ à un artiste (relire nos articles). L’objectif est de recréer la sonnerie complète de six cloches pour le beffroi de l’abbatiale de Fontevraud où plus aucune cloche n’avait résonné depuis la Révolution française ! Depuis 2019, l’Abbaye royale de Fontevraud a donc confié à la Fonderie Cornille-Havard en Normandie, en collaboration avec un artiste, la réalisation de la Ronde : Aliénor (2019) conçue avec Nicolas Barreau et Jules Charbonnet, Richard (2021) conçue avec François Réau, Pétronille (2022) conçue avec Makiko Furuichi, Gabrielle (2023) conçue avec Paul Cox. Et au printemps prochain, l’abbaye accueille une cinquième cloche dont le décor est signé de Vincent Olinet, Julie. Celle-ci rend hommage à la dernière abbesse de Fontevraud, Julie Sophie-Gilette de Pardaillan de Gondrin d’Antin. Cette dernière a été décoché dans l’atelier normand le vendredi 9 février dernier. Elle est arrivée en ce début de semaine à l’Abbaye de Fontevraud pour être positionnée au sein de son écrin de bois puisque toutes les cloches sont installées dans le parc de l’Abbaye dans des abat-son dont la taille varie en fonction de la fréquence de la cloche en question. Elle sera officiellement inaugurée ce samedi 23 mars 2024.
Plus qu’une cloche ou une œuvre, un portrait
L’artiste Vincent Olinet revient sur sa vision de la cloche et sur son travail : « Cette cloche, en plus d’être un objet physique et plastique, est nommée après une personne. On pourrait y voir un portrait mais c’est aussi à travers elle celui de l’Abbaye d’un moment voire d’un siècle. À la lecture de la vie de Julie Sophie-Gilette de Pardaillan de Gondrin d’Antin plusieurs éléments ont retenu mon attention. Sa vie dévouée de longue date à l’Abbaye Royale, son ascension dans la hiérarchie de l’Abbaye, sa gestion prospère ce celle-ci et la fin abrupte de sa carrière concomitante de celle de l’Abbaye. C’est donc avec des textes que j’introduis la cloche Julie. D’abord une pastorale dont les louanges chantent son arrivée1, moment léger et sincère. Puis le récit de l’une des dernières fêtes donnée à l’Abbaye avant la Révolution 2, et enfin les détails sur le personnel à son service et à celui de l’Abbaye 3 dont il me plaisait d’énumérer les différents postes, parfois professions oubliées, ou chargées de tâche dont l’évocation aujourd’hui nous paraît presque insolite. J’ai imaginé un motif dense, foisonnant, joué avec la répétition des motifs, leurs enchevêtrements et combinaisons, leurs profondeurs et interactions. A la fois maladroits, non conventionnels mais marqués par la précision. Et il y a cette bague à jamais chevillée à la cloche comme un clin d’œil à celle que l’abbesse Julie d’Antin confie à son départ de l’Abbaye. Un mélange de brutalité et de finesse. Mille kilos de bronze pour une note de musique et des guirlandes partout ou il était possible d’en rajouter. »
A propos de Vincent Olinet
Originaire de Lyon, Vincent Olinet est diplômé de l’École des Beaux-arts de Lyon depuis 2005. Tour à tour sculpteur, peintre, assembleur, il multiplie les pratiques et s’impose rapidement comme un expérimentateur de matière et d’objets. Il fusionne dans sa pratique la douceur et le romantisme à la pauvreté du matériau, le lyrisme des idées à la brutalité de la réalité. Le public de l’abbaye découvre son travail en juin 2023 avec l’installation « Cordes » qu’il présente dans les jardins de l’hôtel. De cet orchestre composé d’entités silencieuses, instruments réduits à de simples caisses de résonnance, émane une musique qui surgit de l’imaginaire. Au cours de sa résidence en octobre et novembre derniers dans l’atelier centenaire de la fonderie normande, Vincent Olinet a travaillé la cire et créé pour la nouvelle cloche un décor original, illustrant avec érudition et humour un pan de l’histoire de l’abbaye. Il a été exposé notamment au Kunstmuseum de Bern (Suisse), à la Kunsthalle de Darmstadt (Allemagne), à la UBE Biennale au Japon et au centre d’art de la Matmut pour les arts en Normandie. En juin 2023, il réalise une vitrine pour l’inauguration du magasin Hermès à Abu Dhabi. Et depuis 2022, le grand public peut également voir ses œuvres à Nantes, dans le cadre du voyage en hiver
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