Avec AFP
PISA, le programme international pour le suivi des acquis des élèves, est la plus grande étude internationale auprès d’élèves dans le domaine de l’éducation. Pilotée par l’OCDE, PISA mesure l’efficacité des systèmes éducatifs. L’objectif est de comparer les performances des élèves issus de différents environnements d’apprentissage pour comprendre ce qui les prépare le mieux à leur vie d’adulte. PISA 2022, c’est : 85 pays participants, 335 établissements PISA en France métropolitaine et Outre-mer, 8000 élèves qui défendent les couleurs de la France. L’étude est menée tous les trois ans auprès de jeunes de 15 ans, qu’ils soient scolarisés dans un établissement public ou privé sous contrat, au collège ou en lycée agricole, général, technologique ou professionnel. PISA évalue leurs capacités à mobiliser leurs connaissances scolaires et à les utiliser dans des situations proches de la vie quotidienne. En France, l’enquête est réalisée sous la responsabilité du ministère de l’Éducation nationale selon les procédures standardisées de l’OCDE. Elle se déroule dans 335 établissements tirés au sort par une autorité internationale indépendante. Dans chaque établissement, environ 30 élèves de 15 ans sont retenus aléatoirement. L’intérêt est d’évaluer la capacité de l’élève à mettre en perspective ses acquis scolaires afin d’en faire usage durant des situations variées. L’enquête invite les élèves à une introspection sur leur envie et leur manière d’apprendre, notamment grâce à un questionnaire de contexte. Sa périodicité triennale permet aux pays de suivre les progrès accomplis en termes d’éducation.
Le niveau baisse en France comme ailleurs
« Avec une baisse de 21 points en France, c’est une baisse historique du niveau des élèves en mathématiques entre 2018 et 2022, à remettre dans un contexte de baisse globale au niveau international », explique à l’AFP Eric Charbonnier, spécialiste de l’éducation à l’OCDE. Le classement international Pisa qui passe au crible la compréhension de l’écrit, la culture mathématique et la culture scientifique. Pour son édition 2022, il s’attarde spécifiquement sur les mathématiques, comme il l’avait fait en 2012 et 2003. « En mathématiques, la forte baisse observée en France entre 2018 et 2022 est la plus importante observée depuis la première étude Pisa » en 2000, note l’OCDE dans son étude Pisa, qui précise que cette baisse est de « 21 points, contre une baisse de 15 points pour la moyenne OCDE ». « La France ne connait pas sa première baisse de niveau en maths« , lance Eric Charbonnier. Dans les éditions précédentes, « une baisse avait déjà été observée entre 2003 et 2006 puis les résultats sont restés stables entre 2006 et 2018 », précise-t-il. En revanche, les élèves français, qui étaient parmi les plus anxieux des pays de l’OCDE vis-à-vis des mathématiques jusqu’à présent, ont désormais « un niveau d’anxiété au niveau de la moyenne OCDE », un changement qui s’explique par une baisse du niveau d’anxiété des élèves en France entre 2012 et 2022 combinée dans le même temps à une augmentation du niveau d’anxiété dans de nombreux pays de l’OCDE. Ces mauvais résultats en 2022 « sont à inscrire dans le contexte particulier de la pandémie mondiale de Covid-19 mais le Covid n’est pas l’unique explication », selon M. Charbonnier. « Le problème d’attractivité (du métier d’enseignant) a un impact sur les résultats également, comme la crise du Covid », assure-t-il.
« Choc des savoirs »
Selon l’OCDE, en 2022, « 67% des élèves étaient scolarisés dans des établissements dont le principal/proviseur avait déclaré que la capacité à dispenser l’enseignement était entravée par un manque de personnel enseignant. En 2018, ils étaient seulement de 17% ». « On note aussi, par rapport à 2018, qu’il y a une moindre implication parentale dans le suivi des progrès de leur enfant, ce qui a pu également jouer sur le déclin de la performance », ajoute Irène Hu, également spécialiste de l’éducation à l’OCDE. La France connait également une forte baisse du niveau de ses élèves en compréhension de l’écrit, dont la tendance est à la baisse depuis 2012 dans le pays. « La performance des élèves a baissé de 19 points en compréhension de l’écrit, contre 10 points pour la moyenne OCDE » par rapport à 2019, explique l’OCDE. En sciences, les résultats sont restés plutôt stables, « sans que l’on puisse expliquer pourquoi », concède M. Charbonnier. Le ministre de l’Éducation nationale Gabriel Attal a profité de la publication très attendue de l’étude Pisa pour promouvoir son « choc des savoirs » en dévoilant ce mardi après-midi lors d’une conférence de presse, une série de « mesures fortes » pour relever le niveau des élèves, surtout au collège. Il y a quelques semaines, le ministre s’était alarmé des résultats « inquiétants » en français et en mathématiques des évaluations nationales passées en classe de quatrième en septembre. « En quatrième, on voit que durant le collège le niveau stagne, voire régresse, ce qui signifie que le collège ne parvient pas à réduire les écarts constatés à l’entrée en 6e. Le risque, si on ne fait rien, c’est que notre collège tombe en panne », avait-il affirmé.
Les mesures annoncées par le ministre Gabriel Attal
Parmi les mesures annoncées, une nouvelle épreuve du bac en mathématiques et culture scientifique sera créée en classe de première à partir de l’année scolaire 2025-2026, tandis que le diplôme du brevet sera indispensable pour entrer directement au lycée « à partir de la session 2025 ». De nouveaux programmes seront mis en place en primaire, des « groupes de niveaux » en français et en maths au collège. Les professeurs, et non les familles, auront désormais le dernier mot sur le redoublement. « Ecole, collège, lycée: mon souhait est bien de remettre de l’exigence à tous les étages. Avec la science et le bon sens comme boussole », souligne le ministre dans cette lettre, communiquée avant une conférence de presse de présentation de ces mesures prévue en début d’après-midi. Estimant que « notre école a besoin d’une revitalisation pédagogique à la main des enseignants », le ministre annonce notamment que les professeurs « auront désormais le dernier mot s’agissant du redoublement », dans le premier degré (maternelle et élémentaire) comme dans le second degré (collège et lycée). Ils pourront aussi « recommander, voire prescrire » aux élèves des stages de réussite pendant les vacances scolaires « conditionnant leur passage dans la classe supérieure ». Il avait récemment affirmé qu’il fallait « revoir » la « question du tabou du redoublement ». Gabriel Attal indique aussi que « de nouveaux programmes s’appliqueront à l’école primaire, à commencer, dès septembre prochain, par les classes de la maternelle au CE2« , avec comme principes « la simplification » et « la clarification ». Concernant le collège, des groupes de niveaux seront créés « à compter de la rentrée prochaine » en 6e et en 5e pour les enseignements de français et de mathématiques, et « à compter de la rentrée de septembre 2025 » en 4e et 3e. Par ailleurs, le brevet sera réformé pour renforcer son « exigence » et son obtention « conditionnera l’accès direct au lycée ». Les élèves qui ne l’obtiendront pas devront rejoindre une classe « prépa-lycée ». Pour le lycée, le baccalauréat général et technologique, qui prévoit aujourd’hui une épreuve anticipée de français en fin de première, en comptera désormais une autre, « dédiée aux mathématiques et à la culture scientifique, pour l’ensemble de nos élèves », annonce-t-il.
L’éducation dans le Monde selon l’OCDE
Au cours des années perturbées durant lesquelles de nombreux pays et économies ont assisté à une détérioration des résultats de leurs élèves, la Corée, le Japon, la Lituanie et le Taipei chinois ont malgré tout réussi à préserver voire améliorer ces résultats, ainsi que la distribution équitable des possibilités d’apprentissage et le bien-être des élèves. Singapour est arrivé en tête de classement à l’épreuve de mathématiques, suivi de Macao (Chine), du Taipei chinois, de Hong Kong (Chine), du Japon et de la Corée. Malgré une baisse du niveau général, certains systèmes d’enseignement ont sensiblement réduit les écarts de résultats. Dix-huit pays et économies ont obtenu, en 2022, des résultats supérieurs à la moyenne OCDE en mathématiques, en sciences et en lecture. Dans l’ensemble, les résultats en lecture et en sciences sont en recul depuis une dizaine d’années, tandis que ceux en mathématiques sont restés stables de 2003 à 2018. D’une manière générale, la Colombie, Macao (Chine), le Pérou et le Qatar ont progressé dans les trois domaines depuis leur première participation au PISA.
Pour aller plus loin : Pour retrouver l’ensemble des données détaillées et les recommandations de l’OCDE, rendez-vous sur https://www.oecd.org/publication/resultats-du-pisa-2022/.
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