Aux États-Unis, en Europe et, bien entendu, en France, il est un sujet brûlant, non circonscrit dans les limites raisonnables de la décence. Il est alibi, prétexte, pour se disculper de l’essentiel, de la tristesse, de l’incurie de nos représentants à s’acquitter honorablement de sa réalité. L’immigration est ce sujet sensible dont on se doit pourtant de débattre avec objectivité, droiture et humanité. Or, aujourd’hui, l’immigration est un produit d’appel, presque une marque portée par des promotions renforcées et tonitruantes. Trump, plus que tous les autres, le met en scène pour asseoir sa notoriété auprès de consommateurs friands, affriolés par les sons et les images distillés dans l’information en continu et les algorithmes de réseaux obligeants et complaisants. L’influenceur n°1 de la planète, ses émules et les outils de désinformation massive, agissent sur les comportements d’humains souvent dénués de motivations personnelles, mais grands consommateurs d’illustrations omnipotentes. Plus l’auditoire contemple, moins il vit, constatait déjà amèrement Guy Debord, dans « La société du spectacle » édité en 1967. « Plus il accepte de se reconnaître dans les images dominantes du besoin, moins il comprend sa propre existence et son propre désir… C’est pourquoi le spectateur ne se sent chez lui nulle part, car le spectacle est partout. ». Avec le nouveau président des États-Unis nous sommes gâtés, comblés d’aise par les démonstrations multiformes d’actions délirantes toujours commandées par le commerce de l’influence toute puissante de son pays.
Les œufs de Lucie
Dans cette quête de domination sans partage, l’intelligence artificielle prend bonne place sous la forme du projet pharaonique Stargate, doté d’un budget de 500 milliards de dollars. De quoi faire pâlir la Chine (10 fois moins de moyens) et l’Europe qui a pondu un règlement, affirmé ses valeurs respectueuses des droits fondamentaux des citoyens, sans aucune cagnotte dédiée pour engager la comparaison. Quant à la France, elle n’a pas généré la révolution promise. Le 23 janvier dernier, « Lucie », notre IA, a pitoyablement subi le feu des premiers internautes. D’après elle, en effet, nos vaches pondraient des œufs ! D’après nous, Lucie a été surclassée et devra redoubler son CP. Comme d’habitude, l’Amérique va faire la course en tête et, sans scrupule, exploiter sans vergogne toutes les ressources énergétiques de son sol, voire d’ailleurs, pourquoi pas du Groenland. Pour accomplir Stargate, auquel Elon Musk, très courroucé, n’est pas convié, il lui faudra édifier de monumentaux data centers (50 000m² par unité), extrêmement énergivores. Mais ça, Trump n’en a cure, la planète peut encore attendre, comme il n’a cure de l’éthique dans l’enjeu informationnel de nos sociétés. L’IA peut réinventer l’Histoire, comme elle le fait du côté de Pékin, en effaçant le mouvement démocratique de Tiananmen, du 5 juin 1989. Comme elle le fait aussi au Kremlin sur le pacte germano-soviétique d’août 1939. Quand Stargate éduquera le monde, Uncas, ou Cerf Agile, le dernier des Mohicans, aura, lui aussi, probablement disparu.
Georges Chabrier
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