François Bayrou, depuis longtemps, a soigneusement préparé ses valises. Durablement, en effet, a-t-il pensé les poser dans un palais, celui de l’Elysée, ou, à défaut, dans un illustre hôtel, très particulier, de la rue de Varennes. Au nez et à la barbe de ses camarades également pressentis en ce lieu de villégiature éphémère, va-t-il donc finalement s’installer à Matignon dans les chaussons attiédis de Michel Barnier, en exil forcé de son mandat gouvernemental. 311 députés sur les 288 requis en ont décidé ainsi, au terme d’un après-midi de joutes pathétiques, historiques, ponctuées par le vote d’une motion de censure exercée à l’encontre du budget de la Sécurité Sociale. L’affaire était entendue, ou presque, tant les enchères étaient montées pour trouver grâce et générosité auprès d’une Marine Le Pen revancharde et obligée. La présidente du Rassemblement National n’a pas tremblé et coupé le nœud gordien d’un coup d’épée sanglant parachevant la symphonie inachevée du Nouveau Front Populaire. Plus de Premier ministre, plus de gouvernement et dans l’avion de retour de Riyad, un Président à peine ému par la mort annoncée de son valeureux soldat. Il en était convaincu mais l’avait étouffé dans un silence propice à la réflexion, l’étude attentive des CV disponibles et compatibles avec le profil d’une fonction inédite sous la Ve République. Jamais un 49.3 n’avait précipité le pays dans le brouillard épais d’un inconnu inhérent à la neutralisation inextricable des troupes parlementaires. Tout le monde se tient par la barbichette et le premier qui dira aura sa tapette.
Erosion fatale du Président
Passée la peur du KO, brandie piteusement par les piètres résistants du « socle commun », chacun s’en est d’ores et déjà retourné dans son campement fourbir ses armes, ses arguments, ses stratégies pour tirer plus ou moins profit du scénario d’un thriller intrigant dont nul n’imagine vraiment l’épilogue. Certains le voient, le pensent, l’instruisent dans une succession de séquences comparables, de gouvernements qui chutent, renaissent et s’éteignent sous les coups de boutoirs d’élus incapables de s’écouter, à défaut de s’entendre. Rendre le pays incontrôlable est une option franchement affichée par certains, hypocritement désirée par d’autres tout aussi motivés par l’affaiblissement et l’érosion fatale du Président. Sans nouveau budget, notre pays fonctionnera selon les termes du précédent et en contradiction reconduite avec les aspirations majoritaires issues des urnes. “Il paraît que la crise rend les riches plus riches et les pauvres plus pauvres. Je ne vois pas en quoi c’est une crise. Depuis que je suis petit, c’est comme ça”, disait Coluche en écho du désespoir et de la résignation de ceux qui espéraient et qui, demain, risquent de s’exprimer vertement, aiguillonnés par le discrédit du comportement et de la parole politiques. Immanquablement, les crises nous rappellent la gravité, l’importance de la sérénité, de la sagesse et de l’équilibre et favorisent, par occasion, l’émergence de nouveaux leaders. Parfois. Nous nous plairions à le croire, mais la play-list de morceaux choisis de nos stars de la cacophonie parlementaire n’incitent pas à l’optimisme. Bien au contraire, sauf fait extraordinaire guidé par une intervention divine sur les âmes et les consciences de nos représentants. Autant dire un miracle appelé par un pape François, depuis Ajaccio, voire un Donald Trump depuis Notre-Dame, la cathédrale ressuscitée de Paris. Le nouveau chef d’Etat américain est croyant, très inspiré de l’église de Norman Vincent Peale, précurseur de l’évangile de la prospérité. Il prône la réussite matérielle autant que spirituelle, deux aspirations dont se départit minablement notre Etat.
Georges Chabrier
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