C’est une incroyable nouvelle pour le Bioparc, à l’origine du programme d’élevage européen de la loutre géante d’Amazonie (Pteronura brasiliensis) ! Choisie pour la réintroduction dans son milieu naturel, Arirahna, la femelle loutre géante, quittera le Bioparc le 5 janvier prochain pour retrouver ses terres originelles, devenant alors la 1ère loutre géante née en France (et la 4ème en Europe) réintroduite en Argentine, où l’espèce est considérée comme probablement éteinte par l’UICN. Mené par la Fondation Rewilding Argentina à Iberá, au cœur du plus grand parc naturel d’Argentine, la réintroduction de ce grand prédateur emblématique d’Amérique du Sud marque le retour de la biodiversité et le rétablissement d’un équilibre dans les écosystèmes fluviaux du pays. Cet évènement réaffirme également la nécessité des programmes d’élevage qui permettent, lorsque les conditions sont réunies, la réintroduction d’animaux nés en parcs zoologiques, soit afin de renforcer les populations résiduelles, soit pour réintroduire des espèces disparues à l’état naturel. En 2007, le Bioparc fût le 1er zoo français à accueillir un couple de loutres géantes pour participer à la reproduction de l’espèce dans l’espoir de réintroduire sa descendance. La femelle Yucuna née au Zoo de Cali en Colombie et le mâle Diego, né au Zoo de Dortmund, donneront alors naissance à plusieurs petits, dont Arirahna en septembre 2013. Pour Pierre Gay, président de Bioparc conservation : « Il s’agit d’une récompense de nos efforts et de notre foi en notre métier. C’est notre rôle en tant que parc zoologique, la finalité d’un programme d’élevage. Nous sommes fiers de ce retour à la vie sauvage et suivrons avec attention l’avenir de notre loutre. »
Le retour d’un prédateur « presque éteint » en Argentine depuis plus de 20 ans
La loutre de rivière géante (Pteronura brasiliensis) est la plus grande espèce de loutre au monde et peut atteindre jusqu’à 1,8 mètre de long. C’était le prédateur suprême dans les écosystèmes aquatiques de Corrientes, se nourrissant de poissons et de caïmans. Jusqu’au milieu du XXe siècle, il était possible de la voir dans le fleuve Paraná. Sa présence passée à Iberá a également été confirmée lorsqu’un crâne de loutre géante a été trouvé sur l’une des îles de la région. La majeure partie du régime alimentaire d’une loutre de rivière géante est composée de poissons, bien qu’elle puisse également inclure des crustacés, des mollusques et des vertébrés terrestres comme des caïmans, des oiseaux et des rongeurs. En raison de ses habitudes alimentaires, ce carnivore est généralement au sommet de la chaîne alimentaire dans les cours d’eau où il vit et est une espèce clé dans ces écosystèmes. La loutre géante est, selon l’UICN, classée dans les listes rouges nationales comme étant « en danger critique d’extinction » au Paraguay et en Équateur, «en danger» au Pérou, Colombie, Venezuela, Bolivie, comme « Vulnérable » au Brésil. Elle est considérée comme « éteinte » en Uruguay, et « probablement éteinte » en Argentine. La Société argentine pour l’étude des mammifères note qu’il n’y a eu aucune trace d’une population stable ou d’adultes individuels avec des territoires établis en Argentine au cours des trente dernières années au moins. Une combinaison de facteurs liées aux activités humaines a entraîné la disparition progressive de l’espèce sur toute son aire de répartition : destruction de l’habitat, surpêche, contamination des eaux – en particulier par l’exploitation aurifère, l’exploration de combustibles fossiles et l’utilisation de pesticides et d’engrais -, le braconnage, les conflits humains et la mauvaise gestion du tourisme.
Un projet international de réintroduction.
En 2019, un premier couple de loutre géante est arrivé à Corrientes. La femelle provenait du Zoo de Budapest, le mâle du zoo de Givskud au Danemark. Après une période de quarantaine, les deux individus ont été amenés sur l’île de San Alonso, où ils ont été mis en contact puis placés dans un enclos de pré-relâché de 800 m². Situé au bord du lac Paraná, le parc est conçu spécialement pour l’espèce, offrant à la fois un environnement aquatique et des terres plus élevées avec des arbres et de la végétation. Ils y reçoivent quotidiennement des poissons vivants afin de mettre en pratique leurs techniques de pêche. Inséparable, le couple s’est accouplé à de multiples reprises et a eu plusieurs petits. Le groupe familial est relâché progressivement et peut retourner dans son parc s’il le souhaite. Un peu plus loin, un autre bassin accueillera Arirahna et un mâle provenant d’un zoo suédois, afin qu’ils composent une nouvelle famille. Les loutres sont pucées et équipées d’un émetteur radio. Ce projet étant le premier du genre, le suivi après lâcher est crucial et soutenu par l’UICN.
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