Avec PressPepper
Le tribunal administratif d’Orléans a désavoué une aide-soignante du service de pédopsychiatrie pour les maladies neuro-développementales du centre hospitalier du Chinonais, qui entendait contester la sanction qui lui avait été infligée en février 2021 après avoir voulu forcer un enfant à nettoyer le crachat qu’il avait fait au sol avec ses propres habits. la professionnelle avait été exclue pour ces faits pendant un mois, dont la moitié avec sursis, de ce service spécialisé qui accueille des enfants de 3 à 16 ans atteints d’un handicap « lourdement médicalisé ». Mais, devant la justice, elle estimait que cette sanction était « manifestement disproportionnée » dans la mesure où elle avait « toujours donné entière satisfaction » à ses cheffes et qu’elle n’avait « jamais reçu aucune sanction ni avertissement auparavant ». L’éducatrice spécialisée du groupe « vert » du service, groupe dont le travail repose « sur une prise en charge de socialisation et d’autonomisation » de ces jeunes patients, avait en fait rapporté avoir vu cette aide-soignante « attraper par le bras » un enfant « dans l’intention de lui faire nettoyer avec ses propres vêtements le sol sur lequel il venait de cracher« . Elle avait alors « arrêté » le geste de celle-ci, et cette aide-soignante avait aussitôt regretté ce « geste impulsif » qui ne s’était « jamais produit auparavant » et ce « faux pas ». Saisi du dossier, le conseil de discipline avait « préconisé qu’aucune sanction ne soit prise », relate le tribunal administratif d’Orléans dans un jugement en date du 14 mars 2024 qui vient d’être rendu public, mais la directrice du centre hospitalier de Saint-Benoît-la-Forêt n’avait « pas suivi cet avis » : elle avait décidé malgré tout de sanctionner cette aide-soignante en poste depuis douze ans dans l’établissement – dont deux dans le service de pédopsychiatrie pour les maladies neuro-développementales – pour cet « acte indigne et humiliant« .
Un « événement isolé », mais « grave »
« La circonstance que le conseil de discipline ait voté en faveur de l’absence de sanction et que la plainte déposée par le centre hospitalier [auprès du procureur de la République, ndlr] a été classée sans suites sont (…) sans incidence sur la légalité de la sanction », évacuent d’emblée les juges administratifs orléanais. « L’enfant à l’origine de l’incident avait pour habitude de cracher, et il avait été décidé en réunion d’équipe de lui faire nettoyer le sol lorsque cela se produirait », recontextualisent-ils par ailleurs. Mais « il n’en demeure pas moins » que cet « événement » du 4 novembre 2020 « allait au-delà de la mise en oeuvre du choix éducatif fait par l’équipe encadrante », soulignent les magistrats. Et si « la qualité de son travail était reconnue tant par sa hiérarchie que par ses collègues », le comportement de l’aide-soignante « peut être regardé comme fautif ». « L’événement, bien qu’isolé, est grave : il porte atteinte à la dignité d’un enfant souffrant d’une maladie neurodéveloppementale« , rappelle en effet le tribunal administratif d’Orléans. Une exclusion de fonctions de quatre semaines, dont la moitié avec sursis, était donc bien une sanction « proportionnée » aux faits que l’aide-soignante avait commis. Sa collègue a, elle, eu davantage de chance : l’exclusion de fonctions de trois jours qui lui avait été infligée pour avoir « mis un casque sur la tête » d’une fillette avec une « visée vexatoire » puis l’avoir « laissée seule sans porter attention aux risques d’étranglement », suite aux révélations de la même éducatrice spécialisée, a pour sa part été annulée.
L’hôpital condamné à verser 1 500 euros à une seconde aide-soignante
Cette aide-soignante faisait en fait face à « un comportement problème de type cris » de la part de l’enfant, relate le tribunal administratif dans ce second jugement en date du même jour. La petite avait « pu subir des menaces des soignants verbalisant qu’elle aurait « un casque sur la tête » si elle continuait de crier », avait rapporté l’éducatrice spécialisée. « Cette menace a pu être mise à exécution par les soignants, car cela vexe [la fillette] », avait expliqué cette dernière. « Et, pour certains soignants, la vexation de l’enfant permet qu’elle comprenne que le comportement n’est pas possible. Or, il s’agit d’humiliation… J’ai pu enlever le casque (…), casque qui tombait sur la tête de l’enfant, cordon à sa gorge. Lors de la réunion d’équipe (…) j’ai pu alerter qu’il s’agissait d’une faute grave. » Reste que si cette éducatrice spécialisée « relate précisément certains événements auxquels elle indique avoir assisté de visu » – comme dans le cas de la première aide-soignante empoignant un enfant pour lui faire essuyer son crachat – dans cette seconde affaire elle « se borne (…) à indiquer que le casque avait été mis par la requérante sans affirmer l’avoir vu faire ni être intervenue en conséquence », fait remarquer le tribunal administratif d’Orléans. Lors de son entretien avec sa hiérarchie, il avait d’ailleurs été simplement demandé à cette seconde aide-soignante si elle « avait mis un casque à l’enfant », ce à quoi l’intéressée avait dit que c’était « possible » mais qu’elle n’en avait « pas le souvenir »… « Ce compte-rendu d’entretien fait également état de ce que cette pratique de mettre un casque sur la tête de la petite fille pour éviter qu’elle ne se blesse avait été discutée avec sa mère qui recourait elle-même à cette méthode », soulignent les juges. La sanction a donc été annulée et le centre hospitalier du Chinonais condamné à verser 1 500 € à la seconde aide-soignante pour ses frais de justice. Les parties ont jusqu’à ce lundi 13 mai 2024 pour faire appel des deux jugements.
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