Beaufort-en-Anjou. La Chambre Régionale des Comptes épingle la commune, les maires se renvoient la balle

La chambre régionale des comptes des Pays de la Loire a contrôlé les comptes et la gestion de la commune de Beaufort-en-Anjou de 2018 jusqu’à aujourd’hui. Elle dresse un bilan inquiétant de la situation financière de la commune. En réponse le maire actuel, Alain Dozias, et l’ancien maire, Jean-Charles Taugourdeau, se renvoient la responsabilité.

Pour mémoire, la commune compte 7 229 habitants et dispose, en 2022, d’un budget de 9,4M€ de recettes de fonctionnement et emploie 84 équivalents temps plein travaillés. Durant la période sous contrôle de la chambre, elle a connu trois maires : un premier jusqu’en juillet 2020, un deuxième jusqu’en janvier 2023, puis un troisième élu le 28 janvier 2023. La CRC relève plusieurs points d’inquiétude dans son rapport. Tout d’abord, elle souligne que la commune de Beaufort-en-Anjou a récupéré à la suite de la création de l’intercommunalité Baugeois-Ballée en 2016, « des compétences auparavant exercées par la communauté de communes notamment en matière de culture, d’animation et de jeunesse ou encore la piscine Pharéo » qui pèse sur le budget communal. Par ailleurs, la CRC estime que « la commune dispose d’un patrimoine immobilier et foncier particulièrement important alors que ses capacités financières sont limitées. Aucune stratégie n’a été formalisée et les moyens consacrés à l’entretien et aux grosses réparations sont insuffisants. Le manque de suivi dans le pilotage de ses principales opérations immobilières a généré des surcoûts et des risques juridiques et financiers. » Elle évoque notamment les bâtiments de l’ancien Hôtel Dieu en très mauvais état et fermés depuis 30 ans, ou encore les projets avortés de 80 logements à Montbeaume et sur l’îlot Notre-Dame, qui ont coûté à la collectivité. « Dans ce contexte, l’acquisition du site «Le Chanvre » en 2021, pour un coût de 1,25M€, interroge. L’impact sur les finances de la commune n’a pas été mesuré puisqu’aucun chiffrage des coûts de mise en conformité, de maintenance et des travaux nécessaires à la mise en œuvre des projets n’a été réalisé. Au surplus, la commune a conclu, en janvier 2023, avec une société, pour un complexe de bowling et de karting, un bail comportant des clauses financières et juridiques risquées. Par suite, constatant que les travaux promis au locataire n’étaient ni chiffrés, ni financés, la nouvelle municipalité a souhaité retirer la délibération puis céder le bâtiment », indique le rapport de la CRC. Globalement, elle fait remarquer « une situation financière dégradée qui appelle des mesures de redressement. » (Voir le rapport complet sur ce lien).

Une nouvelle équipe qui tente de rattraper le navire

Dans une réponse adressée à la CRC, le maire actuel et ses équipes, Alain Dozias, rappelle que « la majorité municipale, issue des élections partielles de fin janvier 2023, s’est emparée, dès son installation, de la construction budgétaire, et s’est très vite rendue compte de la mauvaise situation financière de la collectivité ». La majorité a également commandé un audit financier. « Les deux intervenants extérieurs ont tenu un discours identique, quant à une situation financière dégradée et des mesures de redressement nécessaires », poursuit l’édile, assurant sur « la collectivité a immédiatement pris des mesures (augmentation de la fiscalité locale, baisse des subventions aux associations…) et voté un budget prudent. » Enfin, Alain Dozias assure que « depuis son installation et jusqu’à ce jour, la majorité a engagé et finalisé un certain nombre d’actions de redressement des comptes et de structuration de son organisation. Elle poursuivra sur cette trajectoire, en suivant les 12 recommandations et les préconisations de la Chambre régionale des Comptes ». (Voir la réponse complète).

Une réponse très politique de Jean-Charles Taugourdeau

Une autre réponse, très politique, a été fournie à ce rapport, c’est celle de l’ancien maire de Beaufort-en-Anjou, Jean-Charles Taugourdeau. Ce dernier « conteste fermement de nombreuses opinions exprimées dans ce rapport, qui apparaît dans, de nombreux aspects, excessivement technique, et parfois éloigné de la réalité du terrain. » L’ancien maire, de 1991 à 2020 ajoute : « regretter amèrement que la chambre régionale des comptes n’ait pas répondu favorablement à ma demande d’intervention en juillet 2020 alors que des contestations de l’opposition se faisaient jour. Vous estimiez alors qu’il n’y avait aucun motif à intervenir. Maintenant que mes opposants sont aux commandes, la chambre procède à son contrôle et reprend sans distance suffisantes des affirmations de l’exécutif actuel, pourtant bien contestables. Je ne cache pas, par exemple, être particulièrement inquiet sur la manière préoccupante dont la municipalité actuelle traite le dossier du Chanvre, refusant de comprendre l’atout que peut représenter ce site et se désengageant dans le désordre et sans méthode des engagements pris par la commune. » Jean-Charles Taugourdeau se défend également en assurant avoir géré la commune avec une vision sur le long terme : « J’ai toujours considéré qu’être Maire n’était pas un métier, mais une fonction. Qui plus est, cette fonction est remise en jeu tous les six ans (voir moins en cas de complot). Et pourtant pour assumer pleinement sa fonction de Maire, et la rendre efficiente sur 6 ans, il faut avoir une vision à 30 ans. Cela permet d’être logique dans l’implantation des constructions prévues qui ne se font pas toujours dans l’ordre prévu. C’est souvent l’assurance d’obtenir des subventions concernant tel ou tel projet qui détermine le lancement d’une construction. Les gros dossiers, notamment ceux relevant de l’urbanisme ou du patrimoine, nécessitent de nombreuses années. Par exemple : 22 ans pour le musée, 10 ans pour le collège, 23 ans pour la piscine, quant au patrimoine, les délais dépendent essentiellement des capacités de l’État à nous subventionner. […] La première moitié on prépare le ou les projets. La deuxième moitié on exécute, on construit si on a les subventions. Je souligne cela parce que nous avons été interrompus au bout de deux ans et 4 mois en période où on s’assure de l’obtention de subventions. Nous n’avons même pas fait la première moitié du mandat, les trois groupes d’opposants ayant démissionné en bloc le 29 octobre 2022. » Jean-Charles Taugourdeau assure par ailleurs que la municipalité actuelle était pleinement au fait de la situation financière de la commune : « On nous dit aujourd’hui qu’il n’y a plus d’argent, mais il n’y en a jamais eu ! D’ailleurs cela ne pouvait pas être une surprise, puisque le premier adjoint aux finances actuel était déjà premier adjoint aux finances lorsqu’il a fait lui-même avec mon accord, un audit en interne de nos finances. Nous savions tous, y compris le conseil municipal, que les finances de la commune étaient faibles. Le débat d’orientation budgétaire 2021 l’a rappelé à tous en conseil municipal. À ce débat, l’adjoint aux finances était favorable à l’augmentation des impôts. Il l’a expliqué en conseil municipal et j’ai dit à ce même conseil qu’on augmenterait les impôts que lorsque nous serions sûrs qu’il n’y aurait plus aucun gaspillage d’argent public. Je préférais la chasse au gaspillage plutôt que l’augmentation des impôts. » Et l’ancien édile d’ajouter : « Jusqu’à ce jour, tout ce qui sort de terre est dû au travail que nous avons fait jusque début 2023. En revanche, un certain nombre de projets, décidés et votés bien souvent à l’unanimité des conseillers municipaux ont été abandonnés non pas par manque d’argent, mais simplement pour faire croire en 2025 que la situation se sera un peu améliorée grâce à leur travail et justifiera l’augmentation des subventions aux associations injustement baissées juste pour faire croire que nous avions épuisé les finances municipales. » Enfin, Jean-Charles Taugourdeau dit assumer assume pleinement la gestion du patrimoine immobilier critiquée par le rapport, même s’il regrette que les subventions n’aient pas suivi. (Voir la réponse complète).

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