Maine-et-Loire. Les pêcheurs en Loire échappent au « moratoire »

Le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a débouté l'association Défense des Milieux Aquatiques (DMA), qui lui avait demandé de suspendre les arrêtés des préfets de la Loire-Atlantique et du Maine-et-Loire autorisant la pêche de la lamproie et de l'alose dans la Loire et ses affluents, alors que ces deux espèces de poissons migrateurs sont pourtant classées en "danger d'extinction".

Cette association d’Escoussans (Gironde) demandait en fait une interdiction totale des « captures » de ces poissons au nom du « principe de précaution » : elle s’appuie pour cela sur le travail de LOGRAMI (Loire Grands Migrateurs), une association de Saint-Pourçain-sur-Sioule (Allier) qui fait « un travail remarquable » et qui est « de très loin la meilleure » sur le sujet. « Les lamproies et les aloses constituent des populations sans fidélité à la rivière qui les a vues naître« , expliquait Philippe Garcia, le président de DMA, au juge des référés. « Ces populations ne sont ni spécifiques, ni du département de Maine-et-Loire, ni même du bassin de la Loire, et se mélangent tout au long de l’arc Atlantique. Protéger ces espèces migratrices représente donc un enjeu national. » Or la pêche est « bien entendu impliquée dans l’effondrement » de la population de ces deux espèces « menacées d’extinction ». « Il est urgent de réagir par un moratoire de la pêche (…) afin (…) de ne pas reproduire la situation du saumon dans ce même bassin, l’esturgeon et la grande alose dans le bassin de la Gironde et la lamproie marine dans les bassins de la Gironde et de l’Adour« , insistait donc l’association. « Seul un moratoire peu permettre de ménager des chances de sauver à la fois les espèces, et à terme la pêche. C’est une question de stratégie fondamentale. » Défense des Milieux Aquatiques soulignait au passage que « l’histoire de la pêche montre que les moratoires sont mis en place systématiquement trop tard ». « Aujourd’hui, il s’agit de ne pas renouveler les mêmes erreurs en prononçant un moratoire trop tardif sur le bassin de la Loire. L’administration a besoin de temps, mais les espèces n’en disposent plus. »

Une interdiction serait « injuste » pour les « petites entreprises »

Mais 2025 va être « une année-charnière » pour les fonctionnaires de la préfecture car ils « attendent des infos » qui pourraient contredire les « observations contestables et hypothétiques » de DMA et permettre de « prendre la bonne décision« , avait répliqué à l’audience le juriste des services de l’Etat : une étude de trois ans intitulée « SOS Aloses » a été initiée. Si elle a « pris du retard« , c’est parce qu’il fallait « trouver des financements » : initialement dotée de « 400.000 € », elle va finalement coûter « 1 million d’euros » de fonds publics. Dans ce contexte, une interdiction de la pêche en Loire de ces deux espèces menacées d’extinction serait « injuste » pour les « petites entreprises » qui ont de « petits moyens » et de « petits chiffres d’affaires« , alors que la pêche en Loire présente un « aspect culturel » et est « inscrite dans le patrimoine local ». « Quand j’entends l’administration dire qu’elle ne comprend pas, je lui conseille de prendre des cours, et si possible des cours d’halieutique. C’est vraiment l’exemple de la gestion à la française : on s’arrête de capturer quand tout a déjà été capturé ! C’est pratique : comme ça, les pêcheurs ne sont pas impactés… Mais il faut aussi penser aux générations futures, qui ne sont pas là pour s’exprimer. » « Cela fait dix ans que j’entends ça, dans tous les prétoires », s’est encore lamenté Philippe Garcia. « Il n’y a rien d’impossible dans cette affaire, mais on se borne à nier les évidences… L’administration est perdue : on nous promet une énième étude, un miroir aux alouettes, et pendant ce temps-là on procrastine et on gagne du temps. » « Aucun des moyens invoqués par l’association requérante (…) ne paraît, en l’état de l’instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté », lui donne raison le juge des référés du tribunal administratif de Nantes dans deux ordonnances en date du 25 février 2025 qui viennent d’être rendues publiques. Le même tribunal administratif de Nantes se repenchera sur la légalité des deux décisions en formation collégiale de trois juges, mais pas avant dix-huit mois à deux ans. Si les arrêtés venaient alors à être jugés illégaux, alors DMA serait toujours en droit de demander une indemnisation à l’Etat pour le « préjudice écologique » causé par l’action de ses services.

Avec PressPepper

 

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