L’édito du Kiosque : attention danger !

Notre pays est en crise. Financière, nul ne peut plus l’ignorer, mais également de légitimité parlementaire. L’expression des politiques se focalise dans des postures clivantes, préjudiciables pour la démocratie.  Sous prétexte d’impératif sécuritaire, libertés privées et publiques sont menacées.
©Facebook-Ca Bouge sur Bauné

De Saumur à Antibes, il y a 999 kilomètres. Comme on dit communément, mille bornes, que l’on peut effacer au rythme choisi de ses envies. Aller vite et cher, par les autoroutes, ou musarder dans l’ombre de platanes convergents formant nefs vers quelques joyaux épars de notre patrimoine. Il faut donc opter pour les grands panneaux bleus rivés sur des portiques surplombants, ou la signalétique hétérogène de nationales, de départementales parfois plantées de bornes au chapeau rouge, stigmates d’un temps lointain où chaque kilomètre comptait. A chacun ses options sachant que l’une est linéaire, l’autre tortueuse et parsemée d’embûches nouvelles altérant l’intense sensation de liberté sur la route présumée des vacances. Car il faut avoir l’œil ! Aux radars bienveillants, toujours plus nombreux sur les lieux prétendument accidentogènes, s’ajoutent désormais une pléiade de pièges issus d’une propension absurde et démesurée pour la sécurité.  A tous, il nous a été donné de connaître les cassis ou dos d’âne appropriés aux chaussées déformées, mais voilà qu’à présent surgissent des traquenards inopinés, délibérément érigés pour… déformer nos chaussées et freiner nos voluptueuses escapades.  Une pandémie de précautions s’est répandue chez nos édiles dont les plus petits villages sont dévastés par une frénésie galopante.

Cassis, dos d’âne et coussins berlinois

Qui donc n’as toujours pas aménagé son plateau surélevé, ses ralentisseurs, ses chicanes, ses écluses, ses ilots, posé des coussins berlinois pour parfois limiter la vitesse au-delà de toute raison, en outrance au résultat attendu. Les nouveaux dos d’âne à la conformité contestable sont particulièrement hauts, agressifs et destructeurs même pour les autochtones, souvent les plus nombreux à trébucher et pester sur le tarmac de leurs chaussées désertes. Quant, encore pire, à s’émouvoir devant une vieille Austin-Healey échouée sans gloire sur l’enflure exagérée d’un bitume aux rampants rognés. La reine du jour en visite au château réputé doit quitter son rallye touristique sous les lazzis satiriques, à l’unisson des témoins mélangés. Notre pays est déjà champion du monde des ronds-points, il est en passe de devenir le numéro 1 des dos d’âne, voire d’initiatives psychédéliques telles que dans le bourg de Bauné, à Loire-Authion, dans le Maine-et-Loire, où un entrelacs de courbes enchevêtrées au sol vous expédie droit dans le mur. L’équivoque sécurité est souvent la substance de l’illusion, de chimères. Et pourtant elle s’érige dans notre actualité, incontournable, portée par une demande légitime dont s’emparent allègrement et opportunément des leaders politiques exposés dans une déferlante médiatique. Le clientélisme est ouvert à la concurrence et le nouveau ministre de l’Intérieur bat les rédactions distillant çà et là son intention, les mesures appropriées, partagées, pour un temps compté, avec la compétitrice du Rassemblement national. Qu’en adviendra-t-il de ce désir effréné de sécurité qui inéluctablement s’exprimera aux dépens, au sacrifice de nos vraies libertés. Le moyen d’être sauf, n’est-il pas, en effet, de ne jamais se complaire, de se croire en sécurité et ainsi d’abandonner sa conscience à la commodité. Comme le chien de La Fontaine, porter un collier et sacrifier sa liberté. Maître Loup s’est enfui, il court encore.

Georges Chabrier

 

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