Saumur. Carrefour : cannibale insensible, insatiable !

Un nouveau magasin Carrefour devrait bientôt ouvrir ses portes à quelques pas du « City » installé depuis 10 ans, rue Saint-Nicolas à Saumur. La démarche interpelle, indigne, tant elle portera préjudice aux exploitants actuels. Que pèse le sort d’une famille de neuf salariés face à l’ambition déshumanisée d’un mastodonte irrassasiable.
Barbara et Mehdi Boyaval

Il y a 10 ans, les Saumurois du centre-ville apprenaient enfin la bonne nouvelle. Après deux ans d’indigence, un nouveau supermarché de proximité ouvrait ses portes rue Saint-Nicolas, suite aux désengagements successifs des enseignes Monoprix, Atac et G20. Au terme d’importants travaux d’aménagement, Barbara et Mehdi Boyaval   s’embarquaient donc dans une nouvelle aventure au terme d’une expérience convaincante dans le Morbihan. « Le groupe Carrefour s’était rapproché de nous. Il était en quête d’un investisseur franchisé assez solide pour mener à bien le projet sur Saumur. De fait, nous nous sommes fortement engagés pour proposer et maintenir une offre de qualité. » Aujourd’hui, l’entreprise présente en effet un service parfaitement efficient dans une ambiance familiale particulièrement appréciée par les habitués. « Nous sommes très respectueux des attentes de notre clientèle et sommes attentifs à adapter et renouveler nos services. En ce sens, nous avons même engagé des travaux d’amélioration en 2019 », poursuit Mehdi Boyaval, dont l’avenir s’est brusquement assombri avec l’annonce brutale de l’ouverture d’un concurrent imposé par la même marque, dans l’espace libéré par le magasin Burton (rue du Portail-Louis et rue d’Orléans). Soit à quelques petites centaines de mètres, au mépris de toute considération humaine et commerciale pour ceux qui, en un temps, avaient prêté attention à la sollicitation de l’enseigne. « C’est un véritable coup de couteau dans le dos ! On est venu nous chercher et maintenant on nous trahit, nous condamne. C’est d’une déloyauté et d’une malhonnêteté totales » s’insurge l’exploitant, face à cette décision unilatérale à laquelle il n’a bien entendu jamais été associé. « Ils vont cannibaliser le centre-ville. Le modèle économique ne peut fonctionner sur ces deux offres concurrentes. Mais de la gestion humaine, la marque s’en désintéresse totalement, surtout depuis l’avènement de son nouveau patron, M. Bompard. Pour lui, seuls comptent les résultats et prioritairement le confort des actionnaires. » Face à cet avenir incertain, le couple ne décolère pas et cherche justement une issue pour sauver la situation et la mise en péril des 9 emplois actuels. « Nous sommes en discussion par avocats interposés. Une reprise par le groupe serait certainement pour nous la solution la plus admissible. Cependant, rien ne peut l’assurer. Un rapprochement avec une marque concurrente n’est par ailleurs pas exclu. C’est une option à l’étude ».

Des pratiques abusives

Aujourd’hui, le scepticisme est de mise dans une relation conflictuelle avérée qu’endurent nombre d’exploitants indépendants. Carrefour est d’ailleurs dans le collimateur du ministère de l’Economie et des Finances pour ses pratiques reconnues abusives envers ses locataires gérants et ses franchisés. Assigné en justice par la DGCCRF (Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), Carrefour conteste fermement les allégations portées sur sa propension à imposer des prix de vente trop élevés et des marges réduites préjudiciables pour la pérennité et la rentabilité des commerces. « Il s’en moque complètement. Plus de marchandises sortent des entrepôts, plus il gagne de l’argent”, explique encore M. Boyaval, légitimement conforté par l’exemple saumurois et les conclusions des instances économiques, elles aussi niées par le mastodonte de la distribution. Les affirmations de Bercy sont erronées, se défend encore Carrefour drapé sous une couche d’hypocrisie saisissante. Les affaires se multiplient autour de la marque dont les actions chutent et dont l’image s’érode en France, comme à l’étranger. En 2024, l’assemblée générale des actionnaires a validé à l’unanimité le nouveau salaire de M. Alexandre Bompard : 9 millions d’euros lui ont été alloués sous les huées et quolibets des salariés présents, eux aussi malmenés par une direction des ressources humaines inflexible.  Et pour quelque cent millions d’euros supplémentaires, Carrefour a rejoint le cercle fermé des partenaires « premium » des JO 2024. De quoi blanchir son âme et, selon son slogan, « nourrir tous les espoirs » de ceux qui s’enrichissent dans la pratique du hard discount des relations humaines.

 

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