Avec AFP
Riposte à la vingtième utilisation par Elisabeth Borne de l’outil constitutionnel décrié, qui permet d’adopter des textes sans vote, la motion cosignée par tous les groupes de gauche n’a recueilli que 108 voix sur les 289 requises pour faire tomber le gouvernement. « Vous savez que ces 49-3 s’imposent, mais vous faites semblant, vous jouez les indignés », a lancé la Première ministre dans un hémicycle quasiment désert, rejetant la faute des débats tronqués à des oppositions refusant selon elle le dialogue. Ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) « est un texte de progrès social », a fait valoir Elisabeth Borne, vantant « un budget de 640 milliards d’euros pour notre Sécurité sociale ». Sans convaincre la gauche, qui avait mis entre parenthèses ses divisions pour dénoncer dans une motion unitaire un « passage en force » sur un texte qui « détricote la Sécurité sociale et brutalise notre hôpital public et ses soignants ». « Vous avez rudoyé sans vergogne le Parlement« , a lancé le socialiste Arthur Delaporte. « Vous avez agité le chiffon rouge du déficit public pour mieux justifier les coupes budgétaires, les économies et les défauts d’investissement » dans la santé, a renchéri l’Insoumise Ségolène Amiot.
« Loin du compte »
Opposés au texte, les autres groupes d’opposition n’ont toutefois pas voté la motion de censure. Pour le Rassemblement national, le texte ne répond pas aux « grands enjeux de santé publique dans les territoires ». Mais « votre systématisme à déposer des motions en tous genres est fatigant », a lancé à la gauche le député RN Christophe Bentz. La droite exclut de son côté de censurer le gouvernement sur un texte budgétaire. Le député LR Yannick Neuder a toutefois fustigé un PLFSS « bien loin du compte », citant les « postes non pourvus dans les hôpitaux publics » ou encore la « situation alarmante de la santé mentale ». Le Sénat, dominé par la droite, avait de son côté adopté une version largement remaniée de ce budget, contestant une trajectoire financière jugée irréaliste. Mais le gouvernement a rejeté l’essentiel de ses ajouts. Le déficit de la Sécurité sociale, désormais estimé à 8,7 milliards d’euros pour 2023, atteindrait 10,5 milliards toutes branches confondues en 2024, selon les dernières estimations du gouvernement, qui conteste toute « austérité ». Les comptes sont notamment plombés par les dépenses de l’assurance maladie. Le gouvernement prévoit de contenir leur hausse à 3,2%, grâce à des mesures d’économies sur les dépenses en médicaments, des laboratoires d’analyse ou encore les arrêts maladie. Certaines crispent particulièrement les oppositions, comme la possibilité de suspendre les indemnités d’un assuré quand un médecin mandaté par l’employeur juge son arrêt de travail injustifié. D’autres mesures du PLFSS sont plus consensuelles, comme la gratuité des préservatifs pour les moins de 26 ans ou le remboursement des protections périodiques réutilisables pour les femmes de moins de 26 ans. Pour mettre un coup de frein aux pertes de recettes liées aux exonérations de cotisations, le gouvernement a retenu une proposition de sa majorité gelant les seuils des plus hauts salaires éligibles. Une mesure jugée trop timide par la gauche.
Incertitude sur les franchises
Deux dossiers ont plané sur les débats parlementaires, sans figurer dans le texte. Après avoir agité la menace d’une ponction dans les réserves du régime de retraite complémentaire de l’Agirc-Arrco, géré par les partenaires sociaux, le gouvernement a fini par reculer. Sans renoncer à demander une participation de ce régime aux revalorisations des petites pensions, l’exécutif a décidé de s’en remettre à des négociations entre patronat et syndicats. L’éventuelle hausse des franchises médicales et des participations forfaitaires des assurés, envisagée par le gouvernement sans être formalisée dans ce budget, a également cristallisé les débats. « La décision n’est pas prise », a assuré le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau.
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