Encore une superbe expression animalière, mais cette fois-ci la littérature n’a rien à voir là-dedans, plutôt la céramique. Dite comme cela, sans avoir les références utiles à sa compréhension, impossible de discerner où cette locution veut en venir ; pourtant, vous allez voir que l’image qu’elle représente est très parlante. Même le choix de la bête n’est pas anodin.
Un brin désuète à notre époque, s’observer en chiens de faïence signifie se dévisager, se méfier d’un autre, et réciproquement, éprouver une forte animosité pour autrui, mais en silence. Une sorte de guéguerre froide qui n’appelle, heureusement, guère à conséquence.
Alors quel rapport avec les chiens qui eux, pour le coup, ont tendance à aboyer leurs désaccords de la plus bruyante des façons ? Et quel rapport avec la faïence, matière délicate et fragile ? Eh bien… tout, en fait. Fut un temps où il était courant de décorer sa cheminée de sculptures canines. Elles n’avaient pas nécessairement l’air menaçant, mais à force de se regarder dans le blanc des yeux sans jamais mot dire, une certaine tension les habitait malgré elles. On retrouvait aussi ces effigies comme presse-livres sur les étagères ou bibliothèques. La faïence est une technique de céramique italienne qui a pris son essor au cours du XVIe siècle. On peut imaginer que l’expression est née le siècle suivant, une fois ces poteries bien intégrées dans les domiciles français. Il faut dire qu’en ce temps-là, on se chauffait exclusivement au bois et tous les foyers disposaient de cheminées, il était donc tout à fait normal et banal de chercher à les décorer.
Aujourd’hui plus trop de cheminées dans nos villes, ni de chiens en céramique, pourtant nous gardons cette expression bien vivante. Peut-être devrions-nous, à l’avenir, mettre nos différends à plat et en bavarder comme des pies.
Hugo
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