La question taraude nos gouvernants. Un véritable cauchemar, révélé par le dossier des retraites, hante les nuits feutrées de nos légats réformistes. Comment, en effet, réconcilier la majorité des Français avec le travail, recréer l’osmose entre labeur et plaisir. En offrant un brin de muguet à leurs petites mains, nos grands couturiers du début du XXe siècle provoquèrent l’alchimie. Les brins et les clochettes reléguèrent l’églantine au rang des reliques symbolisant le travail. L’amalgame avait pris. Le muguet et le 1er mai convolaient en justes noces, malgré leurs destins bien contraires. Venu du Japon, le premier s’était épanoui sur les coiffes remarquables de bien-aimées couronnées par les princes et monarques du XVIè siècle. Le second, lui, avait éclos des revendications ouvrières américaines pour obtenir de meilleures conditions de travail, dans le cadre de journées limitées à 8 heures. La contagion gagna la France. Même objectif, mais conséquences plus funestes pour les manifestations réprimées par l’armée qui tira sur la foule, à Fourmies, en 1891. Des morts et des blessés révoltèrent le peuple qui maintint la pression et la tradition finalement décrétée « fête du travail et de la Concorde sociale » par le généreux Maréchal Pétain en 1941. Une journée chômée et payée de bon aloi pour la propagande du régime allié des forces militaires allemandes.
La vie en rose
« Le 1er mai c’est pas gai, je trime a dit le muguet (…) Muguet sois pas chicaneur, car tu donnes du bonheur ». Dans ce discours des fleurs, même Georges Brassens poétisait l’équation à laquelle seront bientôt confrontés nos élus dans l’immense chantier du « travail », face à des syndicats échaudés et aux aguets. En attendant, nos rues vont foisonner de défilés dont l’ampleur bouleversera peut-être le calendrier des priorités et des urgences parlementaires. La mélodie s’est installée dans une contestation galopante, rythmée par un tintamarre de casseroles chantantes, à tout hasard. Au gré du vent, des déplacements, elles essaiment les bémols d’un ressenti fâcheux, ancré, vivace, dont on ne connaîtra l’issue qu’à la fin du bal. Emportées par la foule, écrasées les unes contre les autres, elles devraient bercer nos élus pour un temps certain… Sauf si, dans le calme et reposés, ils percevaient enfin l’expression de leurs proches tintinnabuler dans un 1er mai fraternel et aromal, nuancé de muguet pour présager le bonheur et voir, pourquoi pas, la vie en rose.
Georges Chabrier
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Commentaires 1
J’aime « le généreux Maréchal Pétain » ! Quant aux revendications sur l’âge de départ à la retraite, bien que hors circuit vu mon grand âge, je serai présent à toutes les manifestations, comme toujours, en regrettant tous les absents qui, si la loi est abrogée, profiteront comme ceux qui se seront battus, de cet avantage.