Le Dr Pierre Hervoil – connu aussi localement pour avoir été tête de liste aux élections municipales à Chinon en 2014 – demandait aussi à être déchargé de l’obligation de rembourser les 35.000 € que lui réclame depuis août 2019 l’hôpital suite au versement d’une prime « irrégulière » : elle lui avait été accordée pour lui assurer une rémunération « d’environ 10.000 € nets par mois en échange d’un ajout de patients« , avait-il été dit à l’audience par la rapporteure publique.
Mais cette prime – également versée à « dix » autres médecins de l’établissement, selon son avocat – avait été épinglée en 2016 par la Chambre régionale des comptes (CRC) des Pays de la Loire. Le centre hospitalier de Saumur avait donc mis un terme à ce « contrat d’engagement« , ce qui représentait une perte de rémunération de « 40 % » pour le Dr Pierre Hervoil. »
L’ancien chef de service estimait toutefois que cette réfaction avait été faite par sa hiérarchie « pour le mettre dans une situation financière pénalisante » et pour « contribuer à sa mise à l’écart » : il est « le seul » des onze médecins à s’être vu réclamer l’argent, selon son avocat, puisque les autres ont fait l’objet d’une simple « régularisation » administrative.
La direction accusée d’avoir « organisé son retrait »
« Le Dr Hervoil a en quelque sorte bénéficié des négligences de son établissement pendant plus de quatre ans et demi« , avait résumé à l’audience la rapporteure publique. « Le centre hospitalier, qui ne pouvait ignorer l’illégalité de cette prime, a attendu 2018 pour lui en demander le remboursement alors que la CRC l’avait alerté en 2016. » Pour cette raison, elle avait donc préconisé de ramener à 29.000 € la somme que le Dr Pierre Hervoil devra rembourser à son ancien employeur.
Mais le tribunal administratif de Nantes a purement et simplement rejeté la requête du médecin, désormais installé en libéral au sein de la Communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) du Grand Saumurois.
« M. Hervoil (…) a demandé (…) à se concentrer sur l’unité de soins continus qu’il avait contribué à créer en laissant à deux autres praticiens le soin de préparer au mieux la certification et l’accroissement de la pratique ambulatoire du service« , justifient les juges nantais dans une décision en date du 22 mars 2023 qui vient d’être rendue publique.
« Si l’intéressé soutient qu’il a été poussé à le faire par la direction qui a organisé son retrait, il ne l’établit pas par les témoignages de divers collègues (…) qui se limitent à reconnaître son implication et son rôle déterminant dans l’évolution du centre hospitalier au cours des années antérieures« , développe encore le tribunal administratif de Nantes.
Une « remise en cause budgétaire » faite « de manière globale et équitable«
« Si M. Hervoil soutient que la remise en cause de sa rémunération fait partie des éléments de harcèlement mis en œuvre à son encontre, (…) un maintien de l’indemnité (…) ne pouvait être assuré sur le fondement d’un contrat illégal », rappellent les magistrats. « Le centre hospitalier démontre qu’un travail de remise en cause budgétaire des indemnités du personnel médical a été mené de manière globale et équitable, ainsi qu’en attestent trois praticiens. »
Par ailleurs le bureau du médecin a été occupé par une collègue « qui témoigne qu’elle s’est contentée de ranger les effets personnels du requérant dans les armoires (…) afin d’occuper l’espace », alors que le Dr Hervoil « était placé en congé de maladie pour une durée indéterminée » pour dépression. « Ainsi, l’ensemble de ces faits ne peuvent à eux seuls présumer des agissements constitutifs de harcèlement moral », en conclut le tribunal administratif de Nantes dans son jugement.
Lors de l’audience, l’avocat du médecin s’était déjà dit « effondré » et « en colère » après les conclusions de la rapporteure publique : ses cinq jeux de conclusions successifs semblent n’avoir « servi à rien » alors qu’il était convaincu d’avoir démontré que la « gestion catastrophique » de la fin de carrière de son client relevait en réalité d’une « mise à mort professionnelle« .
Il avait été « placardisé » après l’arrivée du nouveau directeur
« Il a commencé à être placardisé en 2016, avec l’arrivée du nouveau directeur, et a été remplacé par un collègue qu’il avait contribué à recruter », a retracé Me Pierre Brossard. « Trois infirmières » encore en poste ont ainsi « attesté » par écrit que le Dr Pierre Hervoil avait été « extrêmement affecté par sa perte de responsabilités » au sein du centre hospitalier de Saumur.
« Au moins quatre de ses collègues » médecins ont d’ailleurs dénoncé le « traitement spécifique indigne » dont a fait l’objet le Dr Pierre Hervoil et du « rapport clair et explicite » entre ses troubles dépressifs et ses conditions de travail. « C’est heureux qu’il n’ait pas commis l’irréparable », avait d’ailleurs écrit l’un d’eux, alors que le médecin était un temps « proche du suicide« .
Le Dr Pierre Hervoil a jusqu’au 22 mai 2023 pour contester ce jugement devant la cour administrative d’appel de Nantes.
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Commentaires 2
Et bien bravo au nouveau Directeur d’avoir engagé avec courage une vaste opération de régularisation et de sauvetage des deniers publics. C’est l’argent des impôts. Ce médecin a donc à rembourser à rembourser 29 000 euros alors qu’il en a touché illégalement probablement plus de 100 000 sur toute la durée.
Alors que ce médecin a été débouté quasiment sur tout par le tribunal, l’article tel qu’il est rédigé
semble apporter un soutien à cette personne en reprenant comme lors de l’audience tous ses arguments pourtant rejetés. Parti pris ?