Dossier. Environnement : Ce qu’il faut retenir du 6e rapport d’évaluation du GIEC

Le rapport de synthèse du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est publié le 20 mars 2023, à l’issue d’une session d’approbation qui s’est tenue du 13 au 17 mars en Suisse avec les représentants des 195 pays membres du GIEC. Ce document synthétise les rapports des trois groupes de travail sur les éléments physiques du climat, l’adaptation et l’atténuation.

Fruit d’une collaboration internationale, ce nouveau rapport du GIEC synthétise les connaissances scientifiques acquises entre 2015 et 2021 sur le changement climatique, ses causes, ses impacts et les mesures possibles pour l’atténuer et s’y adapter. Ce 6ᵉ rapport d’évaluation constituera la base scientifique principale pour le premier bilan mondial de l’Accord de Paris, qui aura lieu lors de la COP28 à Dubaï (Émirats arabes unis) à la fin de l’année 2023.Depuis plus de 30 ans, le GIEC évalue l’état des connaissances sur l’évolution du climat, ses causes, ses impacts. Il identifie également les possibilités de limiter l’ampleur du réchauffement climatique et la gravité de ses impacts et de s’adapter aux changements attendus. Les rapports du GIEC fournissent un état des lieux régulier des connaissances les plus avancées. Cette production scientifique est au cœur des négociations internationales sur le climat. Elle est aussi fondamentale pour alerter les décideurs et la société civile.

La hausse de la température globale s’est encore accentuée

Le réchauffement du climat mondial dû aux activités humaines est un fait établi, faisant de la décennie 2011-2020 la plus chaude depuis environ 125 000 ans. En 2019, la concentration de CO2 dans l’atmosphère a atteint 410 ppm en moyenne, un taux qui n’avait pas été atteint depuis 2 millions d’années. Les scénarios socio-économiques montrent que le niveau de réchauffement global de 1.5 °C par rapport à l’ère pré-industrielle sera atteint dès le début des années 2030, et ce quels que soient les efforts de réduction immédiate des émissions mondiales de CO2. Les politiques en place fin 2020 conduiraient à un réchauffement global de 2.4 à 3.5°C d’ici la fin du siècle par rapport à l’ère pré-industrielle avec une valeur médiane de 3.2°C.

La vulnérabilité des écosystèmes et des populations s’accroît

Le changement climatique a déjà impacté l’accès à l’eau et à l’alimentation (réduction de la croissance de la productivité agricole sur les 50 dernières années), la santé (augmentation des maladies vectorielles transmises par les moustiques, hausse de la mortalité liée aux vagues de chaleur) et l’activité économique. Il a déjà contribué à des crises humanitaires, en particulier en Asie. Les effets du changement climatique sont amplifiés dans les villes qui concentrent plus de la moitié de la population mondiale. 3,3 milliards de personnes vivent dans des zones qui sont déjà vulnérables au changement climatique. La vulnérabilité des écosystèmes et des populations diffère substantiellement selon les régions. L’Amérique centrale et du Sud, l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud, les petites îles en développement et l’Arctique sont très vulnérables aux dangers climatiques. Entre 2010 et 2020, la mortalité due aux inondations, aux sécheresses et aux tempêtes a été 15 fois supérieure dans les pays très vulnérables par rapport aux pays peu vulnérables.

Les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter

Les émissions de gaz à effet de serre (GES) ont continué à augmenter fortement au cours de la dernière décennie avec en moyenne 56 GtCO2eq par an (l’unité utilisée pour calculer ces émissions), mais deux fois moins vite que lors de la décennie précédente. La poursuite des émissions est principalement due au fait que l’amélioration de l’efficacité énergétique n’a pas compensé l’augmentation globale de l’activité dans de nombreux secteurs économiques, les énergies fossiles et l’industrie restant les principales sources d’émissions. 35 à 45 % des émissions sont liées à la consommation des 10 % de foyers aux plus hauts revenus. La part des émissions attribuées aux zones urbaines augmente, avec 70 % en 2020. Le respect de l’objectif de limiter le réchauffement global à 1.5 °C nécessite un pic des émissions de CO2 en 2025 au plus tard puis une décroissance jusqu’à atteindre la neutralité carbone en 2050. Après 2050, il implique des émissions négatives pour compenser les émissions de CO2 difficiles à abattre dans certains secteurs tels que l’aviation. Il faut également une réduction considérable des émissions des autres gaz à effet de serre, en
particulier du méthane.

Quelles réponses à ces constats ?

L’adaptation : Le nombre de mesures d’adaptation a considérablement augmenté depuis 2014, mais de façon inégale et fortement focalisées sur l’eau. De plus, ces actions demeurent difficilement évaluables par manque d’indicateurs et de rapportage. Il existe de nombreuses options d’adaptation qui peuvent réduire les risques pour les populations et les écosystèmes : systèmes d’alerte précoce, amélioration de l’irrigation, agroécologie, solutions fondées sur la nature… La finance climat internationale dédiée à l’adaptation (entre 4 et 30 %, selon les sources) a progressé, mais elle reste insuffisante et contraint les efforts d’adaptation.

Un développement résilient : Un développement durable pour tous est possible à condition de mettre en œuvre, de manière intégrée, des politiques d’adaptation au changement climatique, des politiques de protection de la biodiversité et des écosystèmes et des politiques de réduction rapide des émissions de gaz à effet de serre. C’est ce que le GIEC appelle le « développement résilient au changement climatique ».

Une transformation systémique : L’atteinte du zéro émission nette de CO2 à l’échelle mondiale en 2050 ne peut reposer que sur une large palette sectorielle : bâtiments, transports, énergie, industrie, préservation des systèmes naturels existants. L’électrification des usages joue un rôle essentiel, à condition de produire de l’électricité bas-carbone. La baisse de la demande en énergie et en matériaux est essentielle pour réduire les émissions. Il est possible de réduire les besoins de 45 % d’ici 2050 par l’efficacité énergétique. La sortie des subventions aux énergies fossiles permettrait d’atteindre 10 % des réductions d’émissions nécessaires d’ici 2030. Le secteur de l’agriculture, la forêt et l’usage des terres représentent un potentiel important de réduction des émissions, avec des bénéfices potentiels pour la biodiversité. Plus la réduction des émissions sera tardive, plus les effets négatifs seront importants, à cause du recours massif aux émissions négatives nécessaire pour atteindre le zéro émission nette, et des impacts climatiques dus au dépassement temporaire des 1.5 °C (« l’overshoot »), qui réduiront l’efficacité des actions.

Prise en compte des liens entre atténuation, adaptation et développement durable : De très nombreuses synergies existent entre l’atténuation, l’adaptation et les Objectifs de développement durable (ODD), si la société s’engage dans des scénarios de développement durable. S’engager dans des scénarios de développement durable nécessite de lever de nombreuses barrières et de mettre en place des incitations, notamment à travers la finance climat, des politiques publiques, le transfert de technologie et la coopération internationale. Les bénéfices de l’action précoce sont plus importants que les coûts macro-économiques de la transition. Le niveau actuel de la finance climat n’est pas à la hauteur des besoins pour s’engager dans des scénarios de développement durable. Les flux financiers privés et publics non alignés avec l’Accord de Paris restent majoritaires, avec 870 milliards de dollars identifiés en 2020 en soutien aux énergies fossiles, soit largement plus que la finance dédiée au climat.

Pour aller plus loin : Pour en savoir plus sur le GIEC découvrez la page dédiée sur le site du ministère de l’écologie : https://www.ecologie.gouv.fr/comprendre-giec

Commentaires 1

  1. 1011-art says:

    Merci pour cette synthèse ! En partage, je vous propose de découvrir ma série de dessins en cours de réalisation : « Vanité », dont le rapport du GIEC est à l’origine : https://1011-art.blogspot.com/p/vanite.html
    Et « La robe de Médée », en conséquence directe : https://1011-art.blogspot.com/p/la-robe-de-medee.html

    Répondre moderated

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