Le petit chaperon rouge.
Allez savoir pourquoi, il me revient souvent le souvenir de ce conte livré à l’imaginaire angoissé de notre enfance. Et aujourd’hui tout particulièrement à ce moment où il me faut régulièrement affronter l’appétit féroce de ceux qui dévorent mon quotidien. Et oui, comme ils nous guettent et nous épient ces prédateurs aux yeux de biches qui nous câlinent et nous abreuvent d’appâts pour nous manger tout crus. Quels mondes merveilleux, empreints de béatitude, nous promettent-ils, banques, assurances et mutuelles, vendeurs de forfaits en tous genres, de voyages et de sécurité, sur fond de musiques tranquillisantes et onctueuses. Comme ils ont de grands sentiments pour nous faire commettre l’acte d’achat, nous embarquer dans l’engagement de leurs offres spécieuses. Bingo ! à tous les coups ils gagnent. Par nécessité ou à l’usure nous finissons par passer commande et délivrons soulagés nos coordonnées bancaires pour valider la transaction. C’est fait ! Dans la foulée, ils vous adressent leurs félicitations, la bienvenue dans leur espace déshumanisé où règnent l’absurde et l’indifférence.
Ça c’était avant !
Car les mondanités, c’était avant… avant qu’un petit grain de sable ne vienne enrayer la mécanique huilée de notre satisfaction. Une panne, une erreur, un changement et nous voilà ventilés aux quatre coins du monde sur des plateformes bancales ou, pire encore, enchaînés aux bémols de nos claviers pour taper 1, taper 2, taper 3, puis patienter un temps d’attente estimé en minutes, pour obtenir un opérateur. « Nous sommes désolés, un trop grand nombre d’appels ne nous permet pas de donner suite à votre demande. Nous vous invitons à renouveler votre appel ». Bip, bip, bip puis le néant. Dans les dernières versions aux frontières de l’intelligence artificielle on nous invite même dans un exercice oral minimaliste à identifier notre requête afin de nous diriger vers le service idoine. « Désolés nous n’avons pas compris votre question » Et toc, bip, bip, bip et le néant. La persévérance venant à bout d’à peu près tout, nous finirons par triompher… ou abdiquer. Pour la plupart, nous nous en remettons, mais pour d’autres que la fracture numérique éloigne de telles pratiques, le parcours est douloureux, parfois tragique. A chacun sa chute finalement, à l’instar du petit chaperon rouge englouti à jamais par Charles Perrault ou ressuscité par les frères Grimm. Tire la chevillette et la bobinette cherra, séduit par le chant trompeur de la sirène qui trop embrasse, mais mal étreint.
Copyright © IGNIS Communication Tous droits réservés
Commentaires 3
Quel agréable remplaçant de Choupauvert ! Le Kiosque garde son esprit d’indépendance et d’humour. Merci
Ma parole, Georges (car je suppose que l’édito est de Georges Chabrier), vous avez vu Karambolage, sur Arte, cette émission qui nous a instruits sur la différence du petit chaperon rouge, selon la version de frère Grimm ou celle de Charles Perrault.
Et merci pour ces éditos de bon sens qui ne manquent pas d’humour.
Mais non Georges, c’est « qui trop embrasse manque le train »……et c’est comme ça que l’on reste Grosjean sur le quai de la gare.