Saumur. Les élèves du lycée Carnot-Bertin rêvent de rebaptiser l’établissement au nom de Noëlla Rouget

Ce jeudi 28 avril 2022, avait lieu l'inauguration d'un nouvel espace au sein du lycée Sadi-Carnot Jean-Bertin. L'espace culturel a en effet été rebaptisé Espace Noëlla Rouget. Toutefois, les élèves rêvent d'aller encore plus loin et souhaiteraient que l'établissement porte le nom de cette résistante au parcours incroyable, née à Saumur.
L'espace culturel du lycée a été renommé Espace Noëlla Rouget, en présence du recteur Willima Marois à gauche et du fils François Rouget à droite. Une étudiante en bac pro cuisine à l'initiative de cette démarche au centre.

En 2020, la résistante née à Saumur Noëlla Rouget décédait du Covid au vénérable âge de 100 ans. Une histoire exceptionnelle et des combats pour la paix auront rythmé son existence. Née à Saumur et ayant grandi à Angers, résistante déportée à Ravensbrück, elle a demandé et obtenu la grâce de son bourreau, Jacques Vasseur. Enfin, elle a passé une partie de sa vie à lutter contre le négationnisme. Cette histoire, les Terminales bac pro cuisine du lycée Carnot-Bertin ont voulu la transmettre. L’année dernière, ils ont découvert cette grande dame lors d’un travail sur la Seconde Guerre mondiale. « Nous avons été subjugués par son parcours et ses combats et avons souhaité approfondir et aller plus loin sur l’histoire de Noëlla Rouget. Le fait qu’elle soit Saumuroise de naissance nous a fait rapidement sentir proche d’elle », expliquent les élèves. C’est ainsi qu’en mai dernier après ce travail de recherche, les élèves ont rédigé un courrier à la mairie de Saumur pour qu’un lieu de la ville porte le nom de cette résistante. « Nous voulions que son nom et ses actions soient plus connus. Aucun espace ne porte son nom dans le département. Nous avions d’abord pensé à une rue, peut-être la rue où elle était née, celle où elle avait vécu. Mais après réflexion et échange avec nos professeurs et la mairie, nous avons décidé de renommer l’espace culturel du lycée espace Noëlla Rouget », expliquent-ils.

Un lycée Noëlla Rouget ?

Pour aller plus loin, les étudiants lancent l’idée : « Et pourquoi ne pas renommer complètement le lycée au nom de Noëlla Rouget. Depuis la fusion des deux établissements, il porte le nom à rallonge de Lycée Sadi-Carnot Jean-Bertin, des noms qui plus est éloignés de nos filières respectives. Par ailleurs, nous nous sommes rendu compte qu’il y avait très peu, trop peu, d’établissement scolaire portant le nom d’une femme. Cela pourrait être selon nous une très bonne idée. Noëlla Rouget portait les valeurs que l’on nous inculque chaque jour ici. C’est aussi une femme, femmes qui sont encore trop invisibilisées. Ce serait donc l’occasion d’en mettre une en avant ainsi que ses combats. » Ses combats, les élèves de 1ere relation clientèle du lycée ont décidé d’en faire une exposition. « Nous avons décidé de retracer son parcours et ses combats. Noëlla Rouget a grandi à Saumur puis est allée étudier à Angers par la suite. Elle a rapidement intégré la résistance. C’est à Angers qu’elle est arrêtée avec son frère et son fiancé, Adrien Tigeot. Ce dernier sera assassiné tandis qu’elle a été déportée au camp de Ravensbrück. Là son fiancé a été assassiné. Noëlla a survécu et à la libération elle a fait gracier son bourreau et assassin de son fiancé, Jacques Vasseur. Elle a pardonné aux responsables de sa déportation et de la mort de son amour. C’est là la preuve d’une bonté et d’une bienveillance immense. Tout au long de sa vie, elle a lutté dans ce sens, pour les droits humains, contre les atrocités de la guerre et combattu le négationnisme. C’est ce message de paix qui nous semblent tellement essentiel que nous voulons porter et qui pourrait résonner plus encore si le lycée portait son nom », appuient les élèves de 1re.

Une démarche émouvante

Le recteur de l’Académie, William Marois, présent à cette inauguration souligne : « je ne peux qu’entendre et apprécier votre demande. Je suis très fière de la démarche que vous portez. Toutefois, cette décision ne me revient pas, ni à l’État. C’est à la collectivité de rattachement de trancher. Quoi qu’il en soit vous avez montré par votre engagement que vous avez beaucoup d’atouts ». De la fierté et de l’émotion, il y en avait également dans les paroles de François Rouget, le fils de Noëlla. « Merci à vous. Je vous suis infiniment reconnaissant du travail que vous avez mené, du projet que vous avez porté et portez encore. Je suis certain qu’elle aurait été très fière de vous et des efforts que vous avez déployés pour porter ses combats encore aujourd’hui », témoigne-t-il des trémolos dans la voix et la larme à l’œil. Même sentiment pour les deux biographes suisses de Noëlla Rouget, Brigitte Exchaquet-Monnier et Eric Monnier (en photo ci-contre), auteurs de « Noëlla Rouget la déportée qui a fait gracier son bourreau ». « C’est la larme à l’œil que je vous parle. Je suis très fière du travail que vous avez réalisé », témoigne Eric Monnier. Et Brigitte Exchaquet-Monnier d’ajouter : « C’est beau de voir des jeunes relever le défi de la mémoire. » Ils expliquent également qu’en septembre dernier, ils ont appris le travail et la démarche menés par ces élèves pour faire renommer une rue ou un espace au nom de Noëlla Rouget. Ils ont alors appuyé leur demande en écrivant une lettre à la mairie de Saumur pour les soutenir.

Pour aller plus loin

Pour aller plus loin et en savoir plus sur la vie de Noëlla Rouget, le livre des biographes Brigitte Exchaquet-Monnier et Eric Monnier se révèle particulièrement complet grâce aux entretiens qu’ils ont pu avoir avec l’intéressée. Le résumé du livre Noëlla Rouget, la déportée qui a fait gracier son bourreau : « À cent ans, Noëlla Rouget accepte de se raconter. Son enfance à Angers, son rôle dans la Résistance, sa déportation, sa douloureuse reconstruction. Le plus incroyable, c’est le combat qu’elle a mené pour sauver celui qui l’a arrêtée. Une leçon d’humanité. Noëlla Rouget s’engage à vingt ans dans la Résistance. Elle transporte tracts et journaux sur son vélo. Mais le 7 juin 1943, tout bascule : son fiancé Adrien est arrêté, et elle le sera deux semaines après, par un Français, Jacques Vasseur, collaborateur zélé nommé à la tête de la section de la Gestapo d’Angers. Noëlla croise dans les couloirs de la prison son fiancé, torturé, et fusillé quelques jours plus tard. Déportée au camp de Ravensbrück en janvier 1944, elle se lie d’amitié avec Geneviève de Gaulle. Quand Jacques Vasseur est enfin retrouvé et jugé en 1965, Noëlla demande au général de Gaulle sa grâce, et l’obtient. La rescapée des camps veut croire à la rédemption de son bourreau, avec qui elle entreprend une correspondance jusqu’à ce qu’il sorte de prison. « J’estime que j’ai eu une belle vie, car j’ai lutté pour des idées que je croyais justes, qui peu à peu font leur chemin. » Noëlla Rouget. »

L’exposition en format numérique ici

Commentaires 5

  1. Marina Bossard says:

    L’exposition hommage est visible en version numérique sur le lien ci-dessous :
    https://www.canva.com/design/DAE5AYjEGOk/YkHhdkS9T6fsL1R22t09rg/view?utm_content=DAE5AYjEGOk&utm_campaign=designshare&utm_medium=link&utm_source=publishsharelink
    Les élèves de 1 RC vous souhaitent une enrichissante visite virtuelle !

    Répondre moderated
  2. Christian Bertrand says:

    Bravo et félicitations les jeunes!!

    Répondre moderated
  3. NATHALIE PIVERT CHALON says:

    Félicitations à tous ces jeunes qui se sont investis dans ce projet avec passion et émotion.
    Bravo à leur enseignante qui a su les guider sur le chemin de la mémoire .

    Répondre moderated
  4. Oui mais... says:

    Ce lycée est un lycée professionnel et ce n’est pas pour rien qu’il a été baptisé Sadi Carnot-Bertin: Jean Bertin, né le 5 septembre 1917 à Druyes-les-Belles-Fontaines et mort le 21 décembre 1975 à Neuilly-sur-Seine, est un ingénieur, inventeur et entrepreneur français du secteur de l’aéronautique et des transports.
    Nicolas Léonard Sadi Carnot est un physicien et ingénieur français, né le 1 juin 1796 à Paris et mort le 24 août 1832 à Ivry-sur-Seine ou à Paris.

    Répondre moderated
  5. Hubert says:

    Bravo mais juste une remarque. Pourquoi les 2 projecteurs à l’extérieur de l’entrée sont allumés jour et nuit, y compris le week-end, 24/24??? Sacré gaspillage…

    Répondre moderated

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Les commentaires sont limités à 500 caractères.
Le Kiosque renforce sa veille : Les commentaires ne seront pas corrigés. Ceux comportant des mots grossiers ou portant atteinte à l'intégrité des individus n'étant pas publics ne seront pas publiés. La courtoisie n'empêche pas la libre expression, nous vous rappelons aussi que le débat s'enrichit d'idées et non de critiques aux personnes. Vous pouvez aussi nous adresser un article, une réflexion, une pensée,... que nous publierons en courrier du lecteur.
Are you sure want to unlock this post?
Unlock left : 0
Are you sure want to cancel subscription?