Une équipe de 5 contrôleurs du CGLPL (contrôleur général des lieux de privation de liberté) a visité le pôle de psychiatrie du centre hospitalier de Chinon du 28 février au 4 mars 2022. Les contrôleurs ont relevé une prise en charge des patients « de grande qualité et particulièrement respectueuses de leurs droits fondamentaux : maintien d’une liberté d’aller et venir maximale, forte implication des soignants, nombreuses activités, architecture des locaux parfaitement adapté, etc. » Le bilan dressé par les contrôleurs souligne qu’il n’y a « jamais de contention et les placements à l’isolement y sont exceptionnels. Cet établissement est l’un des seuls contrôlés par le CGLPL qui parvient à concilier l’ouverture des unités, l’absence de contention et un recours à l’isolement aussi faible. » Une situation favorable qui tranche avec « les constats effectués ces dix dernières années dans d’autres établissements de santé habilités à recevoir des personnes en soins sans consentement. » Ce pôle de psychiatrie comporte deux services intra-hospitaliers qui accueillent chaque année, avec 45 lits, près de 600 patients adultes nécessitant une hospitalisation en soins libres et sans consentement, sur une population de 85 000 habitants. Les soins sont organisés de façon à garantir une présence permanente des soignants auprès des patients avec des nombreuses activités dans et en dehors du service. « Les patients disposent de leur téléphone et de leurs biens personnels. Les repars sont pris collectivement avec les soignants », souligne la contrôleure générale Dominique Simonnot dans un courrier adressé au ministre de la Santé.
Des postes supprimés, d’autres remplacés
Un bon point pour l’hôpital chinonais, pourtant, cette bonne situation pourrait ne pas durer longtemps puisqu’un programme de restructuration pourrait rebattre les cartes et tout désorganiser. Dans son courrier la contrôleure générale commente : « Or, les contrôleurs ont été informés d’un projet de restructuration du pôle, prévoyant des suppressions et remplacements de postes. L’impact de cette réorganisation n’a pas du tout été évalué en termes de maintien de l’accès aux soins et du respect des droits fondamentaux des patients. Du fait de ce projet, cette offre de soins, exemplaire à bien des égards, risque de fortement se dégrader. Ces pratiques mériteraient, au contraire, d’être connues et valorisées, d’autant plus qu’elles confortent le CGLPL dans les recommandations qu’il émet avec constance et démontrent, si besoin était, qu’une prise en charge efficace et respectueuse des droits est possible. » Ce projet de requalification consiste en une réforme des maquettes des ressources humaines. En ce qui concerne la psychiatrie, cela occasionnerait la suppression de 9.68 ETP de postes infirmiers (26.7% des postes) et de 3.6 ETP d’Agents des Services Hospitaliers et la création de 6.1 ETP d’aides-soignants. Les raisons invoquées par la direction sont « l’impossibilité de recruter des IDE de nuit, une meilleure adéquation aux missions confiées aux soignants en transférant 25% des soins à des aides-soignants tout en respectant la règlementation et les compétences de chacun, l’arrêt de l’alternance jour/nuit délétère en termes de conditions de travail. » Le CGLPL regrette que « l’impact de ces suppressions et remplacements de postes ne soit pas du tout évalué » d’autant « qu’aucun déficit budgétaire lié aux crédits affectés à la psychiatrie n’a été objectivé puisque la comptabilité révèle au contraire un excédent de 500 000 euros au titre de l’année 2019. »
Le ministre assure que l’hôpital est très endetté
Dès l’issue de sa visite, le CGLPL a saisi le ministre des Solidarités et de la Santé pour en appeler à sa vigilance sur la nécessité de préserver le fonctionnement du pôle de psychiatrie du centre hospitalier de Chinon et pour l’encourager à mettre en valeur cet établissement qui peut servir de référence pour la diffusion des bonnes pratiques. Le ministre de la Santé Olivier Véran a répondu par courrier la contrôleure générale Dominique Simonnot. Il indique : « La projet actuel de la direction est de faire correspondre les qualifications aux soins requis, notamment en introduisant des aides-soignants dans la composition des équipes, de manière structurelle et organisée, plutôt que par défaut et de façon non anticipée, ce qui pourrait résulter de difficultés actuelles de recrutements infirmiers. De même le service de psychiatrie travaille à un repositionnement global des compétences paramédicales et éducatives : consolidation des compétences en liaison, création de postes d’infirmier de pratiques avancées, réflexion sur les compétences des métiers des filières éducatives. Ce projet a été construit par la direction des soins en concertation avec l’encadrement et l’encadrement supérieur à l’occasion de quatre réunions en janvier dernier. La méthodologie de révision des maquettes a été présentée lors d’une réunion de lancement à laquelle l’ensemble des médecins était convié. Les effectifs associés à ces maquettes sont cohérents avec ceux des autres services de la région. » Le ministre de la Santé poursuit sa lettre par : « Suite à la restitution orale des contrôleurs et à leurs remarques, la modification de la maquette initiale a été actée en réintroduisant un temps infirmier sur un poste de journée 5 jours sur 7. Enfin, s’agissant de la situation financière du centre hospitalier, l’ARS m’a confirmé les très grandes difficultés de l’établissement, qui requiert le versement d’aides importantes en trésorerie. Je vous informe à cet égard que l’excédent constaté en 2019 est essentiellement lié au versement tardif de crédits de rebasage au vu de cet exercice. »
Infos pratiques : Pour en savoir plus, Voir le courrier adressé au ministre des Solidarités et de la Santé et Voir la réponse du ministre des Solidarités et de la Santé.
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